PARACHAT BAMIDBAR ET CHAVOUOT : shabbat le 19 mai 2018 – horaires entrée : 19 h 03 – sortie : 20 h 15
Voici que nous entrons dans le mois de sivan et, à la sortie du shabbat bamidbar, nous entrerons directement dans la fête de Chavouot
PARASHAT BAMIDBAR 2018 : SÉPARER LE BON GRAIN DE L’IVRAIE
Le quatrième tome du Pentateuque ou Houmach, en hébreu, est appelé de manière significative tant en français qu’en hébreu. En effet, en français on l’appelle les « NOMBRES » car, au cours de ce livre, à deux reprises on effectue un dénombrement du peuple juif et, en hébreu il est appelé BAMIDBAR « dans le désert » car il a pour décor le désert Sinaï et, au cours de ces lectures, il sera possible de se souvenir de ce qu’enseignent les Hazal : la Torah a été promulguée à travers 3 « éléments »[1] : le feu, l’eau et la poussière/terre/sable.
Le Shlah HaKadosh[2] interprète les dénombrements exigés par HaShem comme l’expression de Son affection pour Son peuple car, écrivit-il, un homme riche est toujours occupé à compter les pierres précieuses ou les perles qu’il possède pour être sûr qu’il n’en a pas perdu ou alors, tout comme un père ou une mère soucieux à propos de sa progéniture, s’assure en les comptant souvent qu’aucun d’eux ne s’est fourvoyé.
Le Kli Yakar[3] donne une raison pour laquelle le deuxième dénombrement a lieu un mois après le premier : c’est seulement après qu’un homme soit installé dans un lieu quelconque qu’il peut être considéré comme résident, c’est-à-dire qu’il peut être pris en considération tout comme quelqu’un qui réside en un lieu depuis un mois est astreint à fixer une mezouza.
La sidra de Bamidbar précède toujours la fête de Shavouoth qui termine la période de sept semaines pendant lesquels, chaque soir, les hommes comptent, en minyane, les 49 soirées qui séparent le premier soir de Pessah jusqu’à la fête des « bikourim » (primeurs). Cette fête des moissons est un rappel du midrash rabba[4] dans lequel le peuple juif est comparé au blé. Au bon grain et pas à la paille. Ainsi Israël est assimilé à un gros tas de gros grains de blé et non pas à la paille qui peut s’envoler et ne pourra rien produire au contraire du blé qui peut donner naissance à d’autres épis ou duquel on peut produire de la farine ou confectionner de la nourriture. Le blé possède une valeur, au contraire de la paille qui, elle, est équivalente aux autres peuples, qui ne reconnaissent ni D ni Sa Torah. Les Juifs observant les mitsvoth énoncées dans la Torah et suppliant HaShem dans leurs prières, sont chers au Créateur à l’opposé des autres nations qui adressent leurs suppliques ou leurs louanges à d’autres « objectifs ».
Pour en revenir aux trois éléments cités plus haut, il nous faut expliquer pourquoi les Hazal ont cité : le désert, l’eau et le feu.
LE DESERT : parce que le désert est un lieu par excellence pour se retrouver, faire le point et revenir à la genèse des choses car, le désert c’est le sable, la terre dont on est sorti et vers laquelle on retourne, car, c’est dans la terre/poussière que Rabbi Shimon bar Yohay a vécu avec son fils 12 ans durant, enterrés jusqu’au cou et ne se nourrissant que de caroubes, dans un isolement sociétal complet pour éviter d’être distrait et dans cet isolement parvenir jusqu’aux sphères supérieures et faire partie de cette nature qui rapproche l’homme de son Créateur.
C’est aussi parce que c’est dans le désert que se sont produits des faits grandioses tels que le don de la Torah bien évidemment, mais c’est encore et toujours dans le désert qu’a été érigé le Mishkan. Bien entendu pouvons-nous relever aussi les différents faux-pas faits par certains protagonistes tels les « explorateurs » ou les différentes « révoltes » et c’est encore dans le désert que sont morts tous ceux qui ont participé notamment à la faute du veau d’or.
Cependant, HaShem, dans Sa Miséricorde a donné cette source d’Eau Vive qu’est la Torah, source auprès de laquelle, quiconque est altéré peut venir étancher sa soif[5].
Rabbi Shimôn bar Yohay écrivit, dans le Zohar, que lorsque D proposa à Israël de lui faire présent de la Torah et que le peuple s’exclama : « Naâssé Venishmâ », immédiatement, D fit présent à chacun d’un glaive sur lesquels était gravé le Shem Hameforash[6]. Chacun sachant qu’en élevant ses yeux vers le ciel, sa supplique serait entendu de D, Seul et Unique à pouvoir aider Ses créatures.
Les Hazal affirment dans la Guemara Yoma ; La Torah n’a été donnée qu’à ceux qui ont mangé la manne (tombée du ciel) [7] car ces derniers ont été témoins de l’attachement du Saint béni soit-IL à Ses enfants : en effet, HaShem aurait pu donner une fois dans l’année la quantité totale de manne nécessaire à l’usage d’une famille mais, IL tint à distribuer la manne quotidiennement comme une mère, par amour, donne la becquée à ses petits et, de cette manière, les yeux d’Israël étaient tournés vers le Ciel pour prier et demander.
Les Hazal nous enseignent encore un autre principe qui me semble très fort : dans le désert, nous avons reçu la Torah gratuitement telle une dot[8], nous avons été nourris et abreuvés gratuitement pour qu’en compensation nous puissions prier D et observer Ses mitsvoth sans espoir de récompense, gratuitement, simplement par amour. C’est ainsi, que quiconque est fidèle, se doit d’étudier et d’enseigner gratuitement לשם שמים de même que nous avons reçu cet enseignement.
L’étude et l’enseignement de la Torah sont indispensable à l’homme tout comme il est impossible à l’être humain de vivre et résister sans boire de l’eau une journée complète, l’âme ne peut résister dans un corps sans être abreuvée de Torah. A l’époque des invasions grecque et romaine, les envahisseurs avaient, entre autres, interdit d’étudier la Torah c’est la raison pour laquelle, les Sages de l’époque avaient institué la lecture hebdomadaire de passages prophétiques rappelant le sujet de la parasha qui aurait dû être lue en public à la synagogue et, si les fidèles moyens se contentaient de cela il va sans dire que les rabbanim et les « talmidé hakhamim »[9] étudiaient en cachette mettant leur vie en danger ce qui rendit célèbre la réponse de Rabbi Akiba[10] : « si je n’étudie pas je mourrai car je serai assoiffé de Torah et si j’étudie je serai mis à mort, je préfère donc continuer à étudier et à mourir par la Torah » la tradition confie qu’il mourut en disant le mot « Ehad » après avoir récité : SHEMA ISRAEL HASHEM ELOKENOU HASHEM EHAD!
Pour rejoindre notre propos quant aux 3 éléments liés au don de la Torah, il est important de rappeler que le FEU fut l’élément le plus spectaculaire au moment où les Enfants de Jacob, rassemblés au pied du Sinaï « virent » la parole de D car, ainsi qu’il est écrit dans la célèbre poésie chantée lors de la réception de la Reine Shabbat[11] Les « dix paroles » ont été prononcées en une seule fois et tout le peuple entendit et vit la voix divine car un feu grava sur les tables de pierre ces dix paroles établissant les normes entre la créature et son Créateur et régissant les rapports entre les créatures elles-mêmes. Rashi souligne aussi ce fait étant donné que l’homme ne peut voir D et continuer à vivre il voit donc l’expression divine se concrétiser à ses yeux par une flamme.
Ainsi le feu peut-il être une bénédiction tout comme il peut être l’expression de la colère divine et tout détruire sur son passage comme ce fut le cas en Egypte où la plaie de la grêle prit la forme d’un feu détruisant tout et partout où tombaient les grêlons.
Caroline Elishéva REBOUH.
[1] Trois éléments sur quatre ; l’élément qui manque ici est l’air/vent.
[2] Rav Yshâya Halévy Horwitz 1565-1630 auteur du « Shené Louhoth Habrith »
[3] Rav Ephraïm Luntschitz (1550-1619) exégète de la Torah.
[4] Recueil de commentaires allégoriques s’attachant non seulement au pentateuque mais encore aux cinq meguiloth (Esther, Ruth, le Cantique des Cantiques, l’Ecclésiaste et les Proverbes).
[5] Il est écrit dans la Guemara Berakhotהשותה מים לצומאו מברך שהכל נהיה בדברו » soit « celui qui boit pour étancher sa soif doit bénir shéhakol nyhyia bidvaro » c’est-à-dire que quiconque boit de l’eau sans être certain d’être vraiment très assoiffé ne doit pas faire de bénédiction Comment est-ce possible direz-vous ? C’est qu’ici, le mot soif désigne une soif inextinguible de savoir, de Torah, une soif qui, pareille à un feu ne peut être apaisée que par l’étude de la Torah. La soif, en ce cas, est pareille à un feu dévorant.
[6] Nom ineffable.
[7]לא נתנה תורה אלא לאוכלי המן בלבד.
[8] Rappelons que le moment de la promulgation de la Torah est comparé au moment où deux époux s’unissent : D est L’Epoux et Israël l’épousée, la Torah est le contrat de mariage, la Nuée est la Houppa et le Shofar sert à proclamer au monde entier cette Union INDISSOLUBLE de D avec Son peuple.(nous y reviendrons plus loin).
[9] Erudits
[10] Rabbi Akiba, Tana (Talmudiste) de la troisième génération de Tanaïm qui aborda l’étude de la Torah à l’âge de 40 ans. Il naquit au cours du premier siècle de l’ère courante (en 50) et mourut dans le premier tiers du deuxième siècle (135). Il mourut dans de grandes souffrances infligées par les tortures qui lui furent appliquées en tant que rebelle (il avait refusé de s’abstenir d’étudier). Rabbi Akiba fut l’un des dix martyrs exécutés sur les ordres de l’Empereur romain.
[11]LEKHA DODI composée par R’ Shlomo Halévy Alkabetz (1505-1584 Safed (Tsfat)