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Les bactéries dorment pour mieux survivre

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« Les antibiotiques, c’est pas automatique » : c’est le slogan de la campagne lancée par l’Assurance maladie française pour lutter contre les phénomènes de résistances qui menacent de se propager à grande échelle. Et pour cause : si les malades prenaient systématiquement des antibiotiques, les bactéries deviendraient beaucoup plus résistantes et de banales infections se transformeraient rapidement en épidémies fatales. Des chercheurs de l’Université hébraïque de Jérusalem viennent de découvrir un nouveau mécanisme à l’origine de cette résistance des bactéries aux antibiotiques : la dormance.


Antibiotiques
Crédits : AJ Cann

Résistance et tolérance aux antibiotiques
La capacité des bactéries à vaincre les traitements antibiotiques est l’une des problématiques majeures de la médecine et de la pharmaceutique à l’heure actuelle. L’efficacité des antibiotiques a diminué ces dernières décennies à cause de notre usage parfois abusif de ces traitements. En effet, ces derniers stimulent les capacités évolutives des bactéries, qui développent sans cesse de nouvelles stratégies de résistance [2]. Celles-ci peuvent intervenir par le biais de divers mécanismes comme le changement de la conformation de la cible de l’antibiotique par mutation génétique, empêchant alors toute interaction avec la molécule antibiotique. Les bactéries peuvent également sur-exprimer la cible, cliver la molécule antibiotique grâce à des enzymes spécifiques ou encore éliminer l’antibiotique par pompage actif hors de la cellule.
Ces mécanismes de résistance permettent aux micro-organismes de survivre à la présence d’antibiotiques, tant que la dose n’est pas trop élevée. Avant de devenir résistantes, les bactéries sont en général tolérantes à un antibiotique donné. Celui-ci arrête la progression des bactéries sans les tuer. C’est le système immunitaire qui prend le relais pour les éliminer. Cependant, lorsque l’antibiotique est retiré trop tôt, les cellules tolérantes sont capables de proliférer de nouveau, en ayant acquis au passage des mécanismes de résistance pour lutter contre une nouvelle attaque.

La dormance : un mécanisme de tolérance aux antibiotiques
Les recherches menées par le professeur Nathalie Questembert-Balaban de l’Université hébraïque de Jérusalem en collaboration avec le Massachusetts Institute of Technology(MIT) visent à suivre en temps réel les processus évolutifs des bactéries par une approche quantitative et par la modélisation de ces processus. Ces travaux ont été publiés dans Nature le 25 juin dernier.
Dans cette étude, les bactéries Escherichia coli ont été exposées à une concentration élevée d’ampicilline (antibiotique) pendant une durée fixe quotidienne de 3, 5 ou 8 heures. Les bactéries ne présentaient pas de phénomènes de résistance au début de l’étude, mais après 8 à 10 jours de traitements, toutes les bactéries s’étaient adaptées à leur nouvel environnement, pour le moins stressant et hostile. Alors qu’un phénomène de résistance était pressenti, l’observation de ces bactéries durant les expériences a permis de montrer que c’est en fait un mécanisme de tolérance poussé à l’extrême qui a été utilisé par les bactéries pour survivre : la dormance, c’est-à-dire leur capacité à mettre leur métabolisme au plus bas et à ne plus se multiplier.

Des résultats similaires ont été obtenus en utilisant différents antibiotiques, ce qui montre que ce mécanisme n’est pas spécifique à la présence d’ampicilline. De plus, les chercheurs ont réussi à identifier la mutation génétique responsable de ce mécanisme, ouvrant ainsi la voie à de nouveaux travaux et peut-être à de nouvelles thérapies.

De nouvelles pistes pour lutter contre les bactéries
Grâce à ces travaux, les stratégies utilisées par les bactéries pour résister aux antibiotiques sont mieux comprises. Ces résultats nécessitent d’être validés par des études indépendantes, mais si ce mécanisme de dormance devait être confirmé, il pourrait expliquer l’incapacité des antibiotiques à éradiquer certaines bactéries.
Les chercheurs espèrent maintenant réunir des données cliniques pour comprendre les applications possibles de cette découverte sur l’Homme. Le fait que la dormance survienne lorsque les antibiotiques sont administrés à horaires fixes laisse ainsi présager la possibilité de lutter contre ce mécanisme en proposant la prise d’antibiotiques à des horaires variables.

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