Mesdames et Messieurs les Députés Européens,
Cette lettre est une lettre de remerciements,
Grâce à vous, grâce à la recommandation que vous avez formulée, invitant les Etats membres à interdire les «violations de l’intégrité physique des enfants» considérées comme des mutilations, vous m’avez fait prendre conscience que depuis 66 ans, je suis mutilé, invalide.
J’avoue : pendant les 66 années durant lesquelles j’ai porté ce handicap, je ne me suis rendu compte de rien. Quelle erreur !
Je suis circoncis depuis ma naissance, et je ne me suis pas rendu compte que je suis mutilé.
Plus grave encore, ce n’est pas un chirurgien qui m’a amputé mais un religieux, que nous appelons nous les juifs un Mohel.
Pire encore, cet ignoble individu ne m’a même pas demandé mon avis. Il a pratiqué son acte avec la complicité de mes parents, alors que je n’avais que 8 jours, et ne pouvais protester, encore moins résister.
Et cela dure ainsi depuis des générations ! Mon père, mon grand-père et toute la lignée masculine de ma famille ont subi cette mutilation. Et je l’avoue, j’ai également commis ce délit : j’ai fait circoncire mon fils, qui pourrait m’intenter un procès pour avoir porté atteinte à son intégrité physique.
Sans votre révélation, combien aurait encore duré cette pratique trois fois millénaire qui traumatise dans son subconscient le peuple juif ? En le libérant de cette barbarie, vous vous êtes montré comme son bienfaiteur.
Certes, la circoncision, selon l’Organisation mondiale de la santé, protège contre les maladies sexuellement transmissibles et en particulier contre le sida.
Certes, l’OMS a constaté, chez les hommes nouvellement circoncis d’Afrique, une réduction de 57% des infections au VIH.
Certes des experts américains affirment que la circoncision diminue le nombre des infections urinaires, et que si le nombre des circoncis diminue, cela entrainera une augmentation considérable des dépenses de santé.
Mais qu’importe. La réalité, c’est que vous m’avez ouvert les yeux : je suis mutilé et j’ai mutilé mon fils. Et lui le sien.
Conscient de ma nouvelle infirmité, j’ai demandé à la COTOREP une pension d’invalidité. J’ai également réclamé à la Préfecture de Police une carte de GIC (Grand Invalide Civil) pour stationner sur les places réservées aux handicapés. Désormais, je demanderai le tarif GIC à la SNCF, et dans le métro, j’occuperai les places réservées aux personnes frappées d’un handicap. Et je pense aux centaines de milliers d’Européens concernées par votre recommandation et qui vont pouvoir faire valoir leurs droits.
Par contre, et s’il vous plait ne le répétez pas : je vis plutôt bien avec ma mutilation. Oserais-je le dire…j’en suis même fier.
En revanche, je ne suis pas certain que vous puissiez en dire autant du handicap qui vous frappe – et qui se situe ailleurs dans votre anatomie : amalgamer la circoncision et l’excision, de quelle partie du cerveau avez-vous été amputé ?!
Vouloir transformer en délit un acte d’appartenance religieuse qui s’exécute dans la sphère privée au nom de la libre pratique de sa religion, garantie par les Constitutions des pays européens et la Charte des Droit de l’Homme, et qui vise une communauté particulière,
S’imaginer, muni de votre si provisoire mandat européen, posséder les compétences pour comprendre le judaïsme qui a engendré vos pensées et vos lois, et vous a précédé de quelques milliers d’années, C’est faire preuve d’un sérieux manque de circon…spection.
Croyez Mesdames, et Messieurs les membres du Conseil de l’Europe, Mesdames et Messieurs les Députés Européens, en l’assurance de mes salutations diminuées.
© Elie Levy pour Dreuz.info.