Malgré le climat de récession mondial, l’économie israélienne continue de prospérer. Cette terre, qui a connu trop souvent, les affres de la politique et des conflits, est paradoxalement, de plus en plus reconnue pour son innovation et son plein essor, notamment dans le secteur du High-tech. Les opportunités sont donc nombreuses et réelles, et de vraies carrières sont envisageables. Mais attention, ce n’est pas une raison pour foncer tête baissée dans la recherche d’un job, qui plus est si tu es un Olé Hadach (nouvel immigrant) ou ambitionne de le devenir. Il faut que tu saches avant toute chose que les pratiques de recrutement en Israël témoignent de l’existence d’un décalage, que dis-je d’un « fossé » immense avec celles en usage dans les autres pays occidentaux.
Mais « Al-tidag » (ne t’inquiètes pas) comme l’on dit ici. Heureusement, je suis là pour t’aider, et après avoir lu ce « guide pour les nuls », tu pourras entamer tes recherches avec moins d’appréhension, et donc plus de sérénité.
Le CV
Avant toutes choses, il est impératif que nous passions un peu de temps sur ton curriculum vitae. Saches d’ores et déjà que de longues périodes de chômage considérées dans de nombreux pays occidentaux comme au mieux suspectes, au pire éliminatoires, n’inquiéteront absolument pas le recruteur israélien…bien au contraire. Exemple :
– Le recruteur : « Hum…qu’est ce que c’est que ces 4 mois d’interruption entre les 2 emplois ? «
– Le candidat : « Ben..euh, j’étais en Inde… »
– Le recruteur : « Quoi ? 4 mois seulement? Mais qu’est ce qui ne va pas chez toi ??? »
Protectsia
Mais nous avons mis la charrue avant les boeufs. Avant même de parler d’interview, il faut se poser la question essentielle. Comment puis-je l’obtenir ? On le sait, à notre époque, et de toute évidence, internet est le meilleur moyen pour optimiser ses recherches, et décrocher des entretiens. Le meilleur moyen, oui… mais pas en Israël. Ici, à moins que tu ne soies un « freier » (pigeon), il faut que tu saches que tu dois absolument fonctionner à la « vitamine P ».
La vitamine P est l’abréviation de « protectsia» ou «connexions». On entend par là, le fait de connaître « quelqu’un » de haut-placé. J’attire ton attention sur la signification de « connaître quelqu’un ». Bien souvent, cette personne sera aussi proche de toi que le fils du frère de la jeune fille du cousin germain de ton oncle. Peu importe, il est important de mettre l’accent sur la proximité avec ces personnes. Lorsque le recruteur t’ interrogera sur les liens qui t’unissent à cette personne pour laquelle il a un profond respect, témoigne avec fierté et émotion, et n’hésite pas à utiliser tes plus beaux superlatifs pour parler de celui qui est à présent ton meilleur ami. Un vrai Gever (« mec). Place au minimum 37 fois dans la discussion « Ach sheli » (mon frère). Retenir ce conseil, c’est déjà avoir un pied dans la place.
Que porter le jour J ?
Quoi ! tu as un entretien avec le recruteur dans une heure et tu n’as absolument rien a te mettre! Détends-toi, prends une grande inspiration et vérifie ton armoire encore une fois. Tu vois ces jeans? non pas celui troué au niveau du genou, le beau, délavé, sans trous. Il fera parfaitement l’affaire. L’autre, tu pourras toujours le porter une fois embauché.
Pour les femmes, le décolleté est fortement encouragé non seulement pendant les entretiens, mais aussi une fois recrutée, sur le lieu de travail. D’ailleurs, il pourra t’ouvrir de nombreuses portes…Voici un court extrait d’un entretien tout ce qu’il y’a de plus classique :
– Le recruteur : « Dafna…ce décolleté est très provoquant. Vous faîtes quoi ce soir ? »
Ce à quoi vous êtes autorisé à répondre sans que personne n’en soit choqué :
– « J’ai ma réunion hebdomadaire à l’association des gays & lesbiennes de Tel Aviv, pourquoi ? »
Etes-vous libre vendredi ?
Oublie-donc tes référants occidentaux. Non, tu ne citeras pas tes 3 meilleures qualités, et tes 3 pires défauts. Non on ne te demandera pas de parler de la façon dont tu te voies occuper le poste. Non personne ne te demandera non plus, où tu te vois dans 10 ans .
D’ailleurs, soyons clairs toi et moi… si tu t’attends à ce que l’on te demande où tu te vois dans 10 ans, tu te fourres carrément le doigt dans l’oeil. Oh Oh…il faut redescendre sur terre 2 minutes. Youhou…allo la lune, ici la Terre. On est en Israël ici. Déjà que personne ne sait ce qu’il va faire le vendredi soir, alors comment peux-tu penser une seule minute qu’ils soient capables de faire des plans pour 2022 ???
D’ailleurs, c’est vrai ça, que fais-tu vendredi soir ? C’est une question très souvent posée par le recruteur pour affiner au mieux l’idée qu’il se fait de tes capacités à correspondre au profil recherché.
Et puis plus généralement, alors que les questions sur l’orientation sexuelle, la religion ou les aspirations familiales sont un motif de poursuites dans la majorité des pays, en Israël ces sujets sont appelés «les cinq premières minutes de l’entrevue» et sont de toute évidence fortement encouragées.
Enfin, prépare-toi à connaître quelqu’un en commun avec le recruteur. A l’heure de Facebook et Twitter, il paraît même peu probable que le recruteur n’ait pas déjà passé quelques minutes sur les dernières photos de toi tagguées par ton meilleur ami. Mais si… les photos de la soirée de jeudi dernier, où tu as fini totalement « mastoul » (bourré). Tu ne t’en souviens pas…? c’est normal
Petite précision si tu es une femme
Petite, mais néanmoins non dénuée d’intêret. Imagine… l’entretien est terminé, tu es déjà en train de franchir la porte du bureau pour rentrer chez toi, pleine de certitudes quand au fait que l’interview se soit merveilleusement bien passé, enthousiasmée par la sympathie que dégage ton futur employeur, euphorique à l’idée d’annoncer à ton bien-aimé que tu as très certainement trouvé du travail. Tu t’y vois déjà n’est-ce-pas ? Alors juste comme ça, il se peut…je dis bien il se peut qu’au moment où ta main se pose sur la poignée de la porte pour la refermer, que le recruteur te lance : « Au fait, songez-vous à tomber enceinte ces prochains mois ? »
Traduit et adapté très librement par Yoram Salamon du texte « The idiot’s guide to finding a job in Israel » – Benji Lovitt – Blog Times of Israel