Avec son rendement de 2,25% net d’impôts, le Livret A a déjà attiré 13,3 milliards d’euros de collecte depuis le début de l’année. Et ce total devrait être dopé par l’augmentation du plafond de dépôts décidée par le gouvernement, à 19.125 euros mi-septembre puis à 23.906 euros d’ici la fin de l’année. Si les particuliers ont de quoi se réjouir, la mesure risque par contre de peser sur le bilan des banques, explique Guillaume Guidoni, chef économiste du BIPE, cabinet de conseil en stratégie.
Guillaume Guidoni : L’encours de ces deux produits, qui atteint déjà 302 milliards d’euros, devrait bondir de 40 milliards supplémentaires grâce à cette seule mesure. Dans un premier temps, les ménages déjà à la limite de dépôts vont être incités à puiser dans leurs placements soumis à l’impôt pour alimenter ces livrets défiscalisés. Cela devrait entraîner, au total, 30 milliards d’euros de transferts en quelques mois. Dans un deuxième temps, les Français vont placer leurs revenus, notamment salariaux, dans ces produits, générant un apport additionnel de près de 10 milliards d’euros dans les 12 prochains mois.
Capital.fr : Quels seront les placements les plus affectés par ces transferts d’épargne ?
Guillaume Guidoni : Les Français devraient surtout piocher dans leur compte courant et dans leurs livrets bancaires fiscalisés, dont les rendements net d’impôts sont toujours inférieurs à celui du Livret A et du LDD. Au total, ces deux sources d’épargne concentreront plus de la moitié des 30 milliards d’euros de transferts. La majeure partie des encours du Livret A et du LDD étant centralisé à la Caisse des dépôts, qui les utilisent pour financer le logement social, les banques enregistreront une baisse des dépôts bancaires.
Capital.fr : L’assurance vie risque-t-elle aussi de vivre une année noire ?
Guillaume Guidoni : La modification des plafonds n’est pas favorable aux autres supports d’épargne. C’est un nouvel écueil pour le secteur de l’assurance-vie, alors que les retraits ont été inférieurs aux dépôts au cours des 6 premiers mois de l’année, ce qui a entraîné une décollecte de 4,7 milliards d’euros. Mais l’effet sera moins important que sur les produits les plus liquides, car l’assurance vie reste un placement à long terme.
Capital.fr : Les épargnants ont-ils raison de se ruer sur le Livret A ?
Guillaume Guidoni : L’arbitrage des ménages est rationnel. Aucun produit de court terme n’offre un meilleur rendement pour une telle sécurité. Ainsi, les fonds monétaires ne rapportent presque plus rien. Plus largement, dans un environnement de taux bas, y compris à long terme (pour une obligation d’Etat française à 10 ans, le taux est actuellement autour de 2%), le taux du livret A (2,25 % actuellement) est très attractif.
Propos recueillis par Thomas Le Bars