PARACHA MISHPATIM 5785 – VENDREDI 21 FÉVRIER 2025, 23 CH’VAT 5785
Horaires de Shabbat
NETANYA – 17h11 – 18h10
JÉRUSALEM – 16h50 – 18h09
HAÏFA – 17h09 – 18h09
EILAT – 17h13 – 18h11
ASHDOD – 17h13 – 18h11
BEER SHEVA – 17h13 – 18h11
PARIS – 18h03 – 19h11
MARSEILLE – 17h59 – 19h02
LOS ANGELES – 17h21 – 18h22
MIAMI – 18h00 – 18h50
NEW YORK – 17h20 – 19h21
LA COMPLEMENTARITE D’ISRAEL
Avant de commencer le commentaire de cette sidra, il nous faut aborder le sujet des shabbatot spéciaux qui s’échelonnent entre les shabbatot shekalim, zakhor, para, et hahodesh, mais aussi des parashiot doubles. En effet, avant le shabbat zakhor qui précède pourim où l’on évoque un commandement positif : se souvenir de la turpitude d’Amalek qui nous a surpris dès notre sortie d’Egypte, à peine devenus un peuple libre !
Mishpatim signifie, préceptes, lois, statuts. Torah signifie enseignement mais elle est un concentré de lois comme l’est le code civil. La Torah représente un code civil et pénal et le midrash nous enseigne que le premier mot de la Torah qui est « bereshith » signifie que c’est en prévision des deux Torah (Torah écrite et Torah orale) que D a créé le monde.
D a créé le monde pour le peuple d’Israël et pour la Torah c’est à-dire, en quelque sorte, que sans la Torah le peuple d’Israël ne peut exister et, de même, sans le peuple d’Israël, la Torah ne saurait exister car nulle autre nation ne l’a acceptée, et, ainsi l’un est complémentaire de l’autre.
La parasha de Mishpatim fait suite à celle de Yithro. C’est sans aucun doute pour cela que la sidra commence par Veéléh hamishpatim. Rashi fait ainsi remarquer que la conjonction VE se trouve là de manière à signifier que les préceptes qui sont contenus dans Mishpatim font suite à ceux contenus dans le Décalogue.
La première loi a trait à l’esclave hébreu. Il s’agit de quelqu’un qui ne peut rembourser ses dettes et qui, s’engage à servir son créancier pour voir s’effacer sa dette. De cette loi en découleront d’autres comme le spécifiera ensuite la guemara dans le traité de kidoushine.
Ainsi, si un homme doit servir, son maître doit obéir à des lois précises pour qu’il ne soit pas tenté de profiter de son statut de maître : les meilleurs mets seront servis à l’esclave et, au bout d’un certain temps, lorsque sera observée l’année shabbatique1, il sera relaxé sauf si de sa propre volonté il effectuait le choix de continuer à servir son maître.
Un autre aspect du droit est présenté ici : celle de la responsabilité civile et, les répercussions qui peuvent se projeter à cause d’un manque ou d’un refus de voir l’implication dont il est question dans chaque cas. De même que dans le Décalogue il existe un fil conducteur verticalement et horizontalement reliant D à Ses créatures et ces créatures à leur Créateur mais aussi ces mêmes créatures entre elles, ici, des liens sont tissés encore horizontalement entre les créatures humaines pour les rendre responsables et solidaires entre elles mais aussi toutes les créatures sont fondues en une entité dotée de plusieurs facettes : chaque être est une facette et chaque mitsva en est une autre la Torah est un macrocosme composée de microcosmes tout comme le peuple juif est un macrocosme composé de microcosmes. Plus les microcosmes se perfectionnent et plus l’entité qu’ils constituent est parfaite.
Mishpatim est donc, non seulement un énoncé de lois mais aussi un code de conduite sociale pour que les actions soient engagées particulièrement pour l’intérêt général.
Les lois.
Ou plutôt, comment juger une affaire et déterminer le degré de responsabilité d’une personne dans une affaire. Mishpat, mishpatim au pluriel ce sont des jugements. Et, il va être question ici du droit des esclaves, ou d’employés dans certaines acceptions…. Un esclave va-t-il pouvoir être libre un jour ou bien sont-ils esclaves à vie ? La sidra va nous éclairer dans ce domaine ainsi que sur la façon de donner, prêter, etc….
Les trois concepts que nous abordons ici sont mishpat, tsedaka et guemilouth hassadim. Ces trois domaines abordent un pan de la vie sociale ou des relations sociales entre l’homme et son prochain telles que les lois sur le travail et les esclaves, le don, le respect des biens de son prochain, les crimes prémédités ou par inadvertance, les vols, les biens confiés avec ou sans rétribution et les prêts sans compter bon nombre d’autres lois qui sont ici énoncées. Pour ce qui est du don, il ne s’agit pas forcément de don en argent mais cela peut avoir trait aussi au don de soi. Quoiqu’il en soit il ne s’agit pas forcément de personnes dans le besoin mais il peut s’agir de personnes qui ont besoin d’aide physique, d’aide dans des conseils, des démarches. Pour ce qui concerne les prêts en argent il est une obligation de prêter, si on en a la possibilité, et sans intérêt.
Etablir une justice c’est appliquer la loi et établir des relations privilégiées entre les humains mais c’est aussi éveiller l’attention des uns vis-à-vis des autres.
Lorsque dans la sidra précédente Yithro conseille à Moïse de constituer un corps judiciaire à proprement parlé c’est parce qu’il a eu déjà connaissance des sept commandements noahides parmi lesquels celui d’établir des tribunaux pour que règne la justice et qu’elle soit appliquée. Bien avant que ne soient promulguées les « Dix paroles » Moïse se trouvait sans cesse confronté à des litiges dont il lui était sans doute difficile de sortir n’ayant pas de texte véritable sur lequel s’appuyer.
Dans ce passage de la Torah les prémices du Code civil sont énoncés et par ordre de priorité pour parer au plus urgent : les lois sociales et les lois concernant les dommages corporels, les lois des travailleurs et les relations patron-employé ici, il est question de l’esclave : עבד mot provenant de la racine âyin-beth-daleth = âvad = travailler.
Ce mot signifie non pas seulement travailler mais aussi rendre un culte ainsi nous connaissons l’expression âvodat Hashem ou rendre un culte à D. Aussi, la traduction du mot עבד est impropre à mon sens car il s’agit plutôt d’un serviteur de son plein gré qui sera tout dévoué à son maître mais qui ne sera pas réduit en esclavage, le serviteur sera traité en frère. Cette notion d’esclave sera abolie par la suite.
Lorsque, pour des raisons qui lui sont propres un עבד décidera qu’il ne veut pas être affranchi, le « maître » poinçonnera l’oreille du עבד sur le linteau de la porte de la maison. Pourquoi sur le linteau de la porte de la maison ? Parce que lors du sacrifice pascal, pour être sauvés de la dixième plaie, les Bné Israël ont badigeonné du sang de l’agneau pascal pour être préservés de la mort des premiers-nés. Et, c’est par ce geste de badigeonner les linteaux des portes juives qu’a été symbolisé le passage de l’esclavage à la liberté ! Et pourquoi l’oreille ? Parce que nous proclamons notre foi en disant : אחד’ ה אלוקינו’ ה ישראל שמע c’est donc par l’oreille – l’ouïe – que le Juif reçoit sur lui le joug du royaume des cieux…. C’est donc l’oreille qui va être poinçonnée. En lieu et place de recevoir le joug du royaume des cieux, l’esclave dédie sa vie à son maître et à lui être dévoué tout au long de sa vie.
Ce qui nous frappe dès la première lecture est la recherche de protection du faible comme un esclave ou comme un travailleur ou comme une personne économiquement faible et qui, dans un souci de dignité pour ne pas tomber à la charge d’autrui va se vendre, ou plutôt va vendre ses capacités de travail à un employeur, lui seul s’il n’a pas de famille. Les autres faibles sont par exemple une femme enceinte ou une jeune-fille vendue par son père….
Le « souci » est que Moïse doit s’assurer du fait que n’importe qui dans le peuple se soit pénétré de la loi ; ainsi même dans la législation française l’on vous rétorquera : « nul n’est censé ignorer la loi » et il en est de même avec la Torah : la loi est faite pour tous, et tous doivent connaître la loi.
Dans la sidra mishpatim on évoque cette loi du talion qui, si on ne la comprend pas risque de dériver de manière déplaisante : œil pour œil, dent pour dent. La Torah prônerait-elle donc la vengeance ? Non pas !!! Il s’agit d’une réparation : en effet, quelqu’un a perdu un œil par l’imprudence d’un quidam faut-il alors « crever » l’œil du fautif ? Non ! L’intention de עין תחת עין revient à dire qu’il faudra verser une somme déterminée par le juge pour réparer le préjudice causé. La traduction convenable n’est donc pas littéralement œil pour œil, dent pour dent mais : pour un œil crevé sera versée une somme pour le préjudice causé car le dédommagement devra venir en compensation de l’organe ou du membre blessé et donc du manque à gagner par l’incapacité du blessé à gagner sa vie désormais au prorata de la durée temporelle.
Ces lois détaillées sont destinées à faire comprendre à chacun qu’il a une responsabilité individuelle et collective. Que rien ne doit rester impuni, et que tout acte doit être réfléchi. Et, de même que certaines actions sont répercutées sur de nombreuses générations, la conséquence de certains actes peut poursuivre « le fauteur » au-delà de la vie présente par le biais de la métempsychose.
Les lois énumérées tout au long de cette sidra montrent toujours que quel que soit le statut de la personne subissant un dommage, le tribunal peut être saisi de l’affaire et le fort ou l’homme puissant ne profiteront pas de leur position sociale contre la personne faible.
Rabbi Yaakov ben Asher (2) donne à cette parasha des signes : le mot « mishpatim » est l’acronyme dit-il d’un principe inévitable en droit ainsi en hébreu משפט יעשה טרם פשרה שיעשה מצווהc’est-à-dire que le juge ordonne de faire un compromis avant de procéder à un jugement.
Le Maharal de Prague enseigne dans son ouvrage « Gour Arié » que bien que le Décalogue ait été gravé sur deux tables, leur importance est égale et pour cela il s’appuie sur le fait que lorsqu’à trois reprises la Torah parle des 2 boucs émissaires : il aurait suffit que le mot soit au pluriel pour que l’on comprenne qu’il s’agit de deux boucs si donc le texte insiste sur le fait qu’il est question de deux boucs c’est pour t’enseigner qu’ils sont identiques en genre, en poids en apparence.. En conséquence, il convient de comprendre que les lois concernant D sont tout aussi importantes que celles concernant l’être humain. Le Maharal se pose encore la question de savoir pour quelle raison enseigne-t-on que la « Première Parole » équivaut à la première loi contenue dans cette parasha et pourquoi l’esclave juif doit être libéré au terme de sept années ? Il répond à ces interrogations de la manière suivante : le monde a été créé par D au moyen de 10 paroles et chacune de ces paroles correspond à l’une des 10 gravées sur les Tables de pierre et, pour ce qui est des lois concernant l’homme vis-à-vis de son prochain, le cycle de la nature est basé sur le chiffre 7 et l’homme a été créé le sixième jour pour profiter du septième qui est le jour de repos, de liberté et de délices. Ainsi, l’homme réduit à l’esclavage pourra, la septième année être libéré de son état d’esclave, tout comme peuple juif est devenu libre après avoir été libéré de l’esclavage en Egypte.
Dans la sidra de Hayé Sara, nous retrouvons des allusions au décalogue car la Tora nous raconte que le serviteur d’Abraham : Eliezer Damessek3 offrit des bijoux à Rebecca. Rashi s’interroge : quelle importance ce cadeau revêt-il pour que la Torah prenne la peine de détailler le poids et la sorte de bijoux ? Il eut été suffisant d’écrire qu’il a donné des bijoux à la jeune-fille ! Mais, le Sage de Troyes trouve une explication : la boucle d’or que le serviteur remet à Rebecca est une allusion à l’offrande du Mahatsith HaShekel (notre péricope est en général lue pour « shabbat shekalim ») et, quant aux bracelets, Rashi analyse ainsi 2 bracelets ce sont les 2 tables de pierre et leur poids est une allusion aux 10 paroles ! A ce propos d’ailleurs, le Maharal rappelle que le DECALOGUE ne fut en réalité qu’une seule émission verbale qui s’est ensuite diffusée en 10 préceptes pour permettre à l’intelligence humaine de saisir le message car tout cet enseignement tourne autour de l’entité : les deux tables n’en sont qu’une et les 10 paroles n’en sont qu’une.
Chapitre XXIII verset 5 :
.כי-תראה חמור שונאך רובץ תחת משאו, וְחָ דַּ לְ תָ , מֵ עֲזֹב לֹו–עָ זֹב תַּ עֲזֹב, עִ ּמֹו
Si tu vois l’âne de ton ennemi succomber sous sa charge, garde toi de l’abandonner; aide-le, au contraire, à le décharger.
Voici un précepte qui peut surprendre car, lorsqu’on a un ennemi, c’est qu’il y a une raison majeure pour arriver à détester quelqu’un ! Pourquoi la Torah exige-t-elle d’aider mon ennemi ? Ceci est un cas où seul entre en jeu l’ennemi et soi-même : HaShem te demande de sublimer tes sentiments contre cet homme que tu n’aimes pas et cours l’aider pour que la bête ne souffre pas et, que se passe-t-il si devant toi deux bêtes sont écrasées par leurs charges et les maîtres en sont ton ami et ton ennemi ? HaShem te demande d’aider d’abord ton ennemi puis ton ami pour que tes sentiments ne t’asservissent pas et que tu ne cèdes pas devant ton penchant naturel ni devant le yetser harâ (le mauvais penchant).
En conclusion, l’homme se retrouve souvent devant un choix à opérer et, si souvent la Torah conseille d’opter pour quelqu’un de proche, ici, davka (justement), il faut aller secourir celui devant lequel s’esquivent nos sentiments.
Caroline Elisheva REBOUH
1- L’esclave pourra donc servir un maximum de 6 ans et la septième il sera libre. Et, si l’année shabbatique intervient une année seulement après que la personne ait servi en tant qu’esclave, elle sera relaxée de la même façon. De même, si un esclave vient à servir et qu’intervienne l’année du jubilée, il sera définitivement relaxé.
2- Yaakov Ben Asher (1269 à Cologne-1343 à Tolède) auteur du « Arbaâ Tourim » qui a précédé le Shoulhan Aroukh.
3- L’esclave d’Abraham
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