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1979 ! Date de mon alya….
Après avoir abandonné mes deux amis d’enfance, je n’ai rencontré que connaissances superficielles, compagnons éphémères, camaraderie volatile, relations sans grand lendemains. Je n’ai plus jamais retrouvé un ami, très certainement par ma faute mais tout de même!!

Alors réfléchissons ensemble :
Nommez vos cinq amis les plus proches, j’attendrai.
Pensez aux personnes avec qui vous pouvez parler de tout,
Pensez à celles que vous connaissez depuis un moment, celles que vous pouvez toujours appeler.
Maintenant, pensez au nombre de personnes «amies » sur Facebook qui ressemblent vraiment à ce groupe, selon vous.
Sur ce même Facebook, n’avons-nous pas tous un gars du lycée auquel nous ne pensons pas jusqu’à son anniversaire ?
Le nombre de Dunbar, le nombre maximum supposé de relations sociales significatives que vous pouvez avoir, est de 150. L’utilisateur médian du réseau social a un nombre d’amis beaucoup plus élevé….
Combien d’entre eux sont réellement des personnes que vous connaissez ?
Combien parmi elles sont des personnes que vous voudriez voir pour la seule raison que vous appréciez leur présence?
Combien de vos amis sont réellement vos « amis » ?
Comment pouvez-vous connaître la différence ?
Et quelle est cette différence ?

Dans son chef-d’œuvre éthique « L’Éthique à Nicomaque », Aristote tourne son esprit brillant vers le problème de la définition d’une amitié réelle. Il considère qu’une bonne vie requiert non seulement de la vertu, un bien interne dont vous êtes en grande partie responsable, mais exiger aussi des biens extérieurs facilitant la vertu et agréables en eux-mêmes. De telles choses incluent d’être grec, homme, aisé financièrement, instruit, raisonnablement en bonne santé, avoir de la chance et de bons amis.

Pour lui, la question de savoir ce qu’est un ami prend une nouvelle importance.
Dans le livre 8 de cet ouvrage, il définit trois sortes d’amitiés, et une vertu de l’amitié,      la « Philia » ou amour fraternel.
Comme pour toutes les vertus d’Aristote, Philia est à mi-chemin entre deux vices. Le manque d’amour fraternel conduit au vice de l’égoïsme, tandis que la personne trop amicale avec tout le monde est aussi vicieuse, à sa manière.
Aristote conviendrait que « l’ami de tous n’est l’ami de personne ».
Pour être une personne épanouie, au sens aristotélicien, vous devez maîtriser l’art de l’amitié

Mais quels sont les trois types d’amitiés ?
L’amitié d’utilité est le premier type d’amitié évoqué par Aristote.
Ces amitiés sont basées sur ce que peuvent faire, l’une pour l’autre, deux personnes impliquées, n’ayant souvent pas grand-chose à voir l’une avec l’autre, en tant qu’individus.
La personne à qui vous achetez un verre afin qu’elle puisse vous obtenir des billets, vous dire un bon mot ou simplement vous faire paraître meilleur en comparaison.
De telles amitiés incluent l’hospitalité, affirme-t-il. Elles peuvent se terminer rapidement, dès que toute utilité possible pour l’autre personne disparaît

La seconde est l’amitié du plaisir.
Ce sont des amitiés basées sur le plaisir d’une activité partagée, la recherche de plaisirs et d’émotions éphémères.
La personne boira un verre avec vous mais elle n’acceptera jamais de dîner.
Le gars qui ira assister à un match de football avec vous mais ne pourra jamais vous tolérer de le voir ailleurs.
Aristote déclare que c’est l’amitié des jeunes. Il s’agit, encore une fois, d’une amitié de courte durée, car les gens peuvent changer ce qu’ils aiment faire et se retrouver soudainement sans lien avec leur ami.
Dans ces deux amitiés, l’autre n’est pas valorisé « pour elle-même » mais comme un moyen de parvenir à une fin. Le plaisir de l’un et quelque chose d’utile pour l’autre.
Bien que celles-ci soient répertoriées comme des amitiés « mineures », en raison du motif, Aristote est ouvert à l’idée que la forme finale et la plus grande d’amitié trouve cependant sa genèse dans ces catégories.

La dernière catégorie est la «vraie» amitié. L’amitié de la vertu ou l’amitié du «bien».
Nous parlons de personnes que vous aimez pour elles-mêmes, qui vous poussent à devenir une meilleure personne. Vous êtes motivés par le souci de l’individu lui-même, la relation est donc beaucoup plus stable que les deux précédentes. Ces amitiés sont difficiles à trouver car ces personnes font partie des « vertueux ».
Aristote déplore la rareté de telles amitiés, mais note qu’elles sont possibles entre deux personnes vertueuses pouvant investir le temps nécessaire pour créer un tel lien.
S’il nous encourage à rechercher la forme « pure » de l’amitié, il ne pense pas nécessaire-ment que vous êtes une mauvaise personne parce que vous avez des amis des deux types précédents.
Nous les avons tous.
S’il admet que certains plaisirs sont mauvais pour vous, il considère également le plaisir comme un bien dont les gens veulent profiter. Le vrai problème dans ces amitiés intervient si vous ne comprenez pas qu’elles sont de mauvaise qualité et, ainsi, vous ne faites aucun effort pour en trouver de meilleures.
Les amitiés de plaisir sont tout ce que j’ai en ce moment, suis-je une mauvaise personne ?
Non, mais les Aristotéliciens vous encourageraient à progresser.

Commencez à penser à vos amitiés.
Y a-t-il des amis que vous aimeriez mieux connaître ? Faites-le ! Si cela ne fonctionne pas, réessayez.
Aristote est clair : les amitiés vertueuses sont rares, cela peut prendre du temps. Avant de voir les choses fonctionner, il faut aussi être vertueux. Vous n’avez pas besoin d’être un modèle de vertu tout de suite, même Cicéron s’est demandé à quel point il fallait être vertueux pour se faire de vrais amis, mais une compréhension de Philia serait utile !
Dans un monde où les liens sociaux ne cessent de se multiplier, la question de savoir ce qu’est « réellement » l’amitié est importante.
Les conseils d’Aristote, avec ses vues sur les différentes amitiés et leurs possibilités d’amélioration, sont une suggestion indispensable dans notre monde moderne.

Qu’est-ce qu’un véritable ami ?
Aristote nous donne sa définition « l’amitié parfaite » dans cet extrait de l’Éthique à Nicomaque :
« La parfaite amitié est celle des hommes vertueux et qui sont semblables en vertu : car ces amis-là se souhaitent pareillement du bien les uns aux autres en tant qu’ils sont bons, et ils sont bons par eux-mêmes. Mais ceux qui souhaitent du bien à leurs amis pour l’amour de ces derniers sont des amis par excellence (puisqu’ils se comportent ainsi l’un envers l’autre en raison de la propre nature de chacun d’eux, et non par accident); aussi leur amitié persiste-t-elle aussi longtemps qu’ils sont eux-mêmes bons, et la vertu est une disposition stable…
…Toute amitié, en effet, a pour source le bien ou le plaisir, bien ou plaisir envisagés soit au sens absolu, soit seulement pour celui qui aime, c’est-à-dire en raison d’une certaine ressemblance ; mais dans le cas de cette amitié, toutes les qualités que nous avons indiquées appartiennent aux amis par eux-mêmes (car en cette amitié les amis sont semblables aussi pour les autres qualités) et ce qui est bon absolument est aussi agréable absolument. Or ce sont là les principaux objets de l’amitié, et dès lors l’affection et l’amitié existent chez ces amis au plus haut degré et en la forme la plus excellente.

Il est naturel que les amitiés de cette espèce soient rares, car de tels hommes sont en petit nombre. En outre elles exigent comme condition supplémentaire, du temps et des habitudes communes, car, selon le proverbe, il n’est pas possible de se connaître l’un l’autre avant d’avoir consommé ensemble la mesure de sel dont parle le dicton ni d’admettre quelqu’un dans son amitié, ou d’être réellement amis, avant que chacun des intéressés se soit montré à l’autre comme un digne objet d’amitié et lui ait inspiré de la confiance. Et ceux qui s’engagent rapidement dans les liens d’une amitié réciproque ont assurément la volonté d’être amis, mais ils ne le sont pas en réalité, à moins qu’ils ne soient aussi dignes d’être aimés l’un et l’autre, et qu’ils aient connaissance de leurs sentiments : car si la volonté de contracter une amitié est prompte, l’amitié ne l’est pas. »
Aristote (384-322 av. J.-C.), Éthique à Nicomaque, VIII, 4, 1156b

Rony Akrich pour Ashdodcafe.com

A 68 ans, il enseigne l’historiosophie biblique. Il est l’auteur de 7 ouvrages en français sur la pensée hébraïque. « Les présents de l’imparfait » tome 1 et 2 sont ses 2 derniers ouvrages. Un premier livre en hébreu pense et analyse l’actualité hebdomadaire: «מבט יהודי, עם עולם» Il écrit nombre de chroniques et aphorismes en hébreu et français publiés sur les medias. Fondateur et directeur de l’Université Populaire Gratuite de Jérusalem (Café Daat) . Participe à plusieurs forums israéliens de réflexions et d’enseignements de droite comme de gauche. Réside depuis aout 2023 à Ashdod après 37 ans à Kiriat Arba – Hevron.

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