Parashat MISHPATIM 5783 –
Tel Aviv, Ashdod, Netanya, entrée 17 h 08 – sortie : 18 h 07
Marseille : 17 h 53 – 18 h 56
Chers Amis,
Dans dix jours environ nous accueillerons le mois d’Adar et nous nous rapprocherons donc de Pourim. Qui dit Adar dit aussi que Pessah est très bientôt là..Cette semaine, nous abordons la lecture de bien d’autres lois et, de manière à bien prouver que les dix paroles entendues au Sinaï font bien partie des 613 mitsvoth de la Torah, la parasha commence par un vav conjonction de coordination ou vav hahibour en hébreu.
Je voulais vous signaler quelque chose, le mot panim en hébreu signifie visage/figure. Il est au pluriel car il désigne les deux côtés du visage : le droit et le gauche. Le mot pan'(prononcer panne) est donc le singulier et, dans l’hébreu d’aujourd’hui, le mot « panel » ou « pan' » désigne ce qu’en français on dit pan, c’est un pan… Le mot pan en conséquence est un mot d’étymologie biblique et on le retrouve au singulier dans le livre du Cabbaliste Moshé Cordovéro dans son ouvrage « Tomer Débora » ou « Le Palmier de Déborah ».
PARASHAT MISHPATIM ET LES 4 SHABBATOT
Chaque Shabbat nous lisons la parasha de la semaine mais il arrive dans le courant de l’année que nous ajoutions des extraits de la Torah que nous lisons par ailleurs dans l’ordre normal de leur apparition au long des chapitres du Pentateuque. Ces versets pour la lecture desquels nous sortons un sefer torah supplémentaire, sont tirés donc de parashioth dans lesquels il est question de la solennité en question tel que rosh hodesh (néoménie), shabbat hanouka ou shabbat hol hamoed des fêtes de pèlerinage ou même à l’occasion des fêtes de pèlerinage ou des fêtes solennelles comme Rosh Hashana et Kippour ; mais il peut s’agir aussi des 4 shabbatot particuliers qui s’échelonnent près du mois de Adar et pendant ce mois-là.
Dans le deuxième sefer Torah, on lit une portion de la Torah (en général de la parashat Pinhas où il est question de la fête célébrée et des sacrifices qui sont à offrir à cette occasion (la haftara ce shabbat particulier est différente de celle lue pour la parasha hebdomadaire). Pour Rosh Hodesh on évoque les sacrifices présentés au Temple à chaque néoménie.
Ces quatre shabbatot sont : Shabbat Shekalim, Shabbat Zakhor, Shabbat Para, et Shabbat Hahodesh. Ils répondent à des besoins particuliers du Peuple. En effet, voici les dates auxquelles on lit ces versets spéciaux :
SHABBAT SHEKALIM : Au début du mois de Adar, et, – en cas d’année embolismique, au début ou avant le deuxième mois de Adar shéni ou Adar beith-, chaque Juif âgé de plus de 18 ans doit payer le « mahatsit hashekel » (demi shekel) au Cohen. Cette mitsva permettait deux choses : la première était de pouvoir dénombrer le peuple et ensuite, ceci permettait de pouvoir acheter du bétail pour les sacrifices offerts au nom du peuple. Ce shabbat a lieu soit le shabbat précédent Rosh Hodesh Adar soit pour Rosh Hodesh si rosh hodesh est un shabbat. La parasha est prise de la sidra ki-tissa )תישא-כי .)
SHABBAT ZAKHOR : Ce shabbat a lieu avant Pourim. On y lit l’épisode où nous sommes enjoints de nous souvenir de ce que nous a fait Amalek lorsqu’en sortant de la Mer Rouge traversée à pied sec et nous trouvant dans le désert après la sortie d’Egypte, Amalek nous attaqua par l’arrière. D nous recommande d’effacer le souvenir d’Amalek ici-bas. Ce texte provient de la parasha ki-tetsé )תצא כי.)
SHABBAT PARA : Dans les versets lus spécialement à cette occasion, il va être question de la vache rousse dont les cendres vont servir à purifier toute personne qui aura été souillée par une dépouille mortelle. Toute la prescription se trouve dans la sidra Houkat (חוקת .(Ce shabbat est destiné à rappeler à toute personne impure d’avoir à se purifier avant rosh hodesh nissan.
SHABBAT HAHODESH : C’est peu de temps avant Rosh Hodesh nissan que D a précisé à Moshé tout ce que les Bené Israël devaient faire et observer avant, pendant et après la sortie d’Egypte ces prescriptions se trouvent dans la parashat Bo.
PARASHAT MISHPATIM : LES DEBUTS DU CODE CIVIL HEBRAIQUE
Les lois. Mishpat, ou mishpatim au pluriel : ce sont les lois c’est-à-dire que dans cette péricope on va surtout parler de lois qui vont conférer des droits : le droit des esclaves, employés….
Quels sont leurs droits ? Pourront-ils être libres un jour ou bien sont-ils esclaves à vie ? La sidra nous éclaire dans ce domaine ainsi que sur la justice et la façon de donner, prêter, etc….
Exode XXI, 5 et 6 : Et si l’esclave dit : « j’aime mon maître ma femme et mes enfants, je ne veux pas être affranchi », son maître l’amènera au tribunal il le fera approcher près de la porte ou du poteau et son maître lui percera l’oreille avec un poinçon et il le servira pour toujours.
Les trois concepts que nous abordons ici sont mishpat, tsedaka et guemilouth hassadim. Ces trois domaines abordent un pan de la vie sociale ou des relations sociales entre l’homme et son prochain telles que les lois sur le travail et les esclaves, le don, le respect des biens de son prochain, les crimes prémédités ou par inadvertance, les vols, les biens confiés avec ou sans rétribution et les prêts sans compter bon nombre d’autres lois qui sont énoncées. Pour ce qui est du don, il ne s’agit pas forcément de don en argent mais cela peut avoir trait aussi au don de soi. Quoiqu’il en soit, il ne s’agit pas forcément de personnes dans le besoin mais il peut s’agir de personnes qui ont besoin d’aide physique, d’aide dans des conseils, des démarches. Pour ce qui concerne les prêts en argent il est une obligation si on en a la possibilité et que quelqu’un demande un prêt de prêter et sans intérêt.
Etablir une justice c’est faire du bien c’est appliquer la loi c’est établir des relations privilégiées entre les humains et c’est aussi éveiller l’attention des uns vis-à-vis des autres.
Lorsque dans la sidra précédente Jéthro conseille à Moïse de constituer un corps judiciaire à proprement parlé c’est parce qu’il a eu déjà connaissance des sept commandements noahides parmi lesquels celui d’établir des tribunaux pour que règne la justice et qu’elle soit appliquée. Bien avant que ne soient promulguées les « Dix paroles » Moïse se trouvait sans cesse confronté à des litiges dont il lui était sans doute difficile de sortir n’ayant pas de texte véritable sur lequel s’appuyer.
Dans ce passage de la Torah les prémices du Code civil sont énoncés et par ordre de priorité pour parer au plus urgent : les lois sociales et les lois concernant les dommages corporels, les lois des travailleurs et les relations patron-employé ici, il est question de l’esclave : עבד mot provenant de la racine âyin-beth-daleth = âvad = travailler. Ce mot signifie non pas seulement travailler mais aussi rendre un culte ainsi nous connaissons l’expression âvodat Hashem ou rendre un culte à D. Aussi, la traduction du mot עבד est impropre à mon sens car il s’agit plutôt d’un serviteur de son plein gré qui sera tout dévoué à son maître mais qui ne sera pas réduit en esclavage, le serviteur sera traité en frère. Cette notion d’esclave sera abolie par la suite. Car, nous sommes les SERVITEURS D HASHEM et nous n’avons pas d’esclaves car nous avons été esclaves en Egypte et ce n’est pas un statut que nous pourrions appliquer à des êtres humains.
Lorsque, pour des raisons qui lui sont propres un עבד décidera qu’il ne veut pas être affranchi, le « maître » poinçonnera l’oreille du עבד sur le linteau de la porte de la maison. Pourquoi sur le linteau de la porte de la maison ? Parce que lors du sacrifice pascal, pour être sauvés de la dixième plaie, les Bné Israël ont badigeonné du sang de l’agneau pour être préservés de la mort des premiers-nés. Et, c’est par ce geste de badigeonner les linteaux des portes juives qu’a été symbolisé le passage de l’esclavage à la liberté ! Et pourquoi l’oreille ? Parce que nous proclamons notre foi en disant : אחד’ ה אלוקינו’ ה ישראל שמע c’est donc par l’oreille – l’ouïe
– que le Juif reçoit sur lui le joug du royaume des cieux…. C’est donc l’oreille qui va être poinçonnée. En lieu et place de recevoir le joug du royaume des cieux, l’esclave dédie sa vie à son maître et à lui être dévoué tout au long de sa vie.
Ce qui nous frappe dès la première lecture est la recherche de protection du faible comme un esclave ou comme un travailleur ou comme une personne économiquement faible et qui, dans un souci de dignité pour ne pas tomber à la charge d’autrui va se vendre, ou plutôt va vendre ses capacités de travail à un employeur, lui seul s’il n’a pas de famille. Les autres faibles sont par exemple une femme enceinte ou une jeune-fille vendue par son père, soit parce qu’il n’a pas les moyens de rembourser sa dette, soit parce qu’ainsi il peut faire épouser sa fille par un homme jouissant d’un statut social supérieur au sien et à celui auquel sa fille pourrait prétendre si elle n’était pas « vendue »….
Le « souci » est que Moïse doit s’assurer du fait que n’importe qui dans le peuple se soit pénétré de la loi ; ainsi même dans la législation française l’on vous rétorquera : « nul n’est censé ignorer la loi » et il en est de même avec la Torah : la loi est faite pour tous, et tous doivent connaître la loi. C’est ainsi qu’il est écrit dans la Torah une promesse (qui est répétée d’ailleurs chaque jour lors de la prière du matin (exode XV, 26) selon laquelle si le/la juif/juive respecte toutes les lois qu’a édicté HaShem, aucune maladie ne se trouvera sur Israël car D est notre Médecin.
Dans la sidra mishpatim on évoque cette loi du talion qui, si on ne la comprend pas risque de dériver de manière déplaisante : œil pour œil, dent pour dent. La Torah prônerait-elle donc la vengeance ? Non pas !!! Il s’agit d’une réparation : en effet, quelqu’un a perdu un œil par l’imprudence d’un quidam faut-il alors « crever » l’œil du fautif ? Non ! L’intention de תחת עין
עין revient à dire qu’il faudra verser une somme déterminée par le juge pour réparer le préjudice causé. La traduction convenable n’est donc pas littéralement œil pour œil, dent pour dent mais : pour un œil crevé sera versée une somme pour le préjudice causé.
Ces lois détaillées sont destinées à faire comprendre à chacun qu’il a une responsabilité individuelle et collective. Que rien ne doit rester impuni, et que tout acte doit être réfléchi. Et, de même que certaines actions sont répercutées sur de nombreuses générations, la conséquence de certains actes peut poursuivre « le fauteur » au-delà de la vie présente par le biais de la métempsychose.
Les lois énumérées tout au long de cette sidra montrent toujours que quel que soit le statut de la personne subissant un dommage, le tribunal peut être saisi de l’affaire et le fort ou l’homme puissant ne profiteront pas de leur position sociale contre la personne faible.
Dr Caroline Elisheva Rebouh PhD.