PARASHAT HOUKAT 5781– VENDREDI 18 juin 2021 / YOM CHICHI 9 Tamouz 5781- Horaires Ashdod : Entrée 19 h 29 – Sortie : 20 h 32
LA LOI EST DURE MAIS C’EST LA LOI
Les Sages ont su nous faire comprendre qu’il existe dans la Torah trois sortes de lois : celles qui sont des « Edouyoth » (du mot « ed » עד témoin) ce sont les lois concernant shabbat et les différentes solennités par exemple. Il y a les lois concernant par exemple toute la vie sociale « Houkim mishpatiim » qui sont des lois que nous comprenons et qui sont des lois justes et, la troisième sorte de lois qui sont simplement désignées par le mot « HOUKA » sont des lois que nous ne pourrons comprendre que lorsqu’arrivera et se dévoilera le MASHIAH et qu’alors nous seront dévoilés tous les SECRETS qui se cachent derrière des lois telles que la VACHE ROUSSE par exemple… Car, comment expliquer que les cendres de la vache rousse ont la puissance de purifier quelque chose ou quelqu’un d’une impureté une fois brûlée alors que celui même qui s’occupe de la vache rousse, se rend lui-même impur !!
De nombreux commentateurs illustrent de leurs réflexions la raison de cette loi sur la vache rousse en s’appuyant sur le commentaire de Rashi se référant à Rabbi Moshé HaDarshan[1] qui, d’après lui, cette vache rousse vient pour « racheter la faute du veau d’or »[2].
La Torah insiste sur le fait que la vache rousse sera présentée à Moshé Rabbénou : en effet il est écrit : אליך (élékha = à toi). Pourquoi doit-elle être présentée au Prophète plus particulièrement ? Car, seul Moïse connaît tous les aspects de cette loi ! C ‘est pourquoi il est écrit « vers toi » car, non seulement tu sais de quoi il retourne mais cette vache rousse est appelée selon ton nom en vertu, également, du fait que des cendres de cette vache rousse seront préservées en partie et à chaque fois que sera fabriquée de l’eau lustrale, une pincée de cendres de la première vache rousse sera mêlée aux cendres des autres vaches rousses qui seront sacrifiées par la suite.[3]
A propos de cette jeune vache qui sera rousse (n’impliquant nullement que ses géniteurs le soient eux aussi), l’exégète Kli Yakar que nous citons souvent[4], donne une approche très profonde des secrets contenus dans ce sacrifice. En effet, détaille cet homme illustre, entre le moment où la décision de sacrifier cette jeune génisse tombe, et le moment où l’on obtient l’eau lustrale, il faudra 7 actes[5], se composant chacune de 7 opérations, facettes ou intervenants soit en tout 49 étapes représentant chacune l’une des portes de l’intelligence fine.
Le Gaon de Vilna[6] dans son remarquable Adéreth Eliahou cite dans l’ordre les 7 opérations exigées pour sacrifier la jeune génisse : 7 opérations pour le sacrifice, 7 opérations pour la brûler, 7 aspersions, 7 lessives, 7 pour l’impureté, 7 pour la pureté, 7 cohanim[7].
Autre chose : après tout ce qui s’est déroulé pour permettre la sortie d’Egypte, la mort ne devait plus intervenir comme jusqu’alors[8] mais, la mort serait intervenue par un baiser divin ce qui excluait en ce cas, toute notion d’impureté. Cependant, la faute du veau d’or annula cette disposition par un nouvel arrêt divin, la mort continuerait à avoir lieu comme auparavant, dans la toum’a (impureté ) et pas dans la tahara (pureté). La conséquence fut donc de trouver un moyen de se purifier après avoir été rendu impur par un contact ou la présence d’un mort.
Pour en revenir au sujet propre à cette péricope, sur les 613 commandements que renferme la Torah il y a relativement très peu de LOIS qui dépassent notre entendement c’est-à-dire que même si nous croyons comprendre certains côtés d’une loi nous sommes loin d’en connaître les véritables raisons : pour mieux nous faire comprendre ce qu’est une HOUKA, le Midrash nous explique ceci : HaShem a répondu à ceux qui s’interrogent sur certaines questions : HOUKA hakakti ouguezéra gazarti (J’ai promulgué une loi et J ai émis un arrêt) ce qui en langage clair signifie J’ai décidé ceci et il n’y a point de discussion ou, si on veut ramener à une conception plus proche de nous : lorsque nous décidons que notre enfant doit faire ceci ou autre chose, il n’y a pas de discussion. Il faut le faire un point à la ligne. Car, il en est de même pour toutes les lois : elles nous paraissent souvent incompréhensibles et parfois inacceptables mais nous nous devons de les observer.
En fait sur les 613 mitsvoth, une grande partie ne concerne que les Léviim et les Cohanim, une partie ne concerne que les rois (ou assimilés), une autre partie n’est applicable qu’en ce qui concerne ceux qui se trouvent en Erets Israël, une partie s’adresse aux agriculteurs ou aux marchands…. Et aujourd’hui, parce que le Temple n’est pas encore de retour parmi nous, nous sommes privés de certaines mitsvoth alors, devrions-nous être zélés et courir de toutes parts dans l’espoir de nous acquitter d’autres bonnes actions ?
Les Sages nous ont toujours enseigné que d’aimer son prochain est une belle action, aider son prochain en donnant de la tsedaka pour tenter de rétablir un peu de justice sociale et permettre à quelqu’un dans le besoin de manger à sa faim ou de trouver un emploi, sont des moyens de montrer à quel point le sort de notre prochain est important à nos yeux (et à nos cœurs)…. Ouvrir son cœur et sa porte et essayer d’enrayer la jalousie, la calomnie et bien d’autres sentiments licencieux dont les Sages nous ont toujours dit qu’ils excluent l’homme (entendez l’âme) de ce monde.
Cette péricope fait part du décès de Myriam puis d’Aharon. En réalité, le décès de Myriam a eu lieu le 10 Nissan, celui d’Aharon le 1er Ab à Hor HaHar, à la fin du sefer Devarim aura lieu le décès de Moïse pas très loin du lieu où Aharon est enterré. Certains détracteurs en profiteront pour dire que la Torah est pleine d’anachronismes en fait ce n’est pas ainsi. Certains évènements ne sont pas « traités » selon l’ordre chronologique mais selon une importance particulière. Lorsque Myriam a déprécié l’attitude de son frère Moïse dans sa vie conjugale, elle a reçu une punition. Par la suite, Aharon et Moïse ont fait une autre faute : ils ont frappé le rocher à Meriba au lieu de lui parler ce qui entraîna une sentence grave de sens etde portée pour l’ensemble du peuple. La « punition » fut que les deux illustres hommes ne verront pas la terre d’Israël. En réalité tout ceci est lié non pas en temps (quoiqu’à quelques mois près…) mais dans les évènements de causes à effet : en effet, par le fait que le peuple ne s’affligea pas de la disparition de Myriam alors que c’est grâce aux mérites de la Prophétesse que les enfants d’Israël ont eu de l’eau à boire pendant 40 années et ils se sont plaints de ne pas avoir d’eau mais ils n’ont montré aucun regret de la disparition de cette femme !
La Torah indique que Myriam est morte, sans en dire davantage mais, lorsque plus loin, il est question de la mort d’Aharon, le texte consigne qu’Israël a pleuré le Grand Prêtre plus tard, il en sera de même pour Moïse. Alors, que s’est-il passé ? Le Kli Yakar insiste sur le fait que la pénurie d’eau à Mériba fut la conséquence directe du manque de reconnaissance de ce peuple vis-à-vis de cette femme méritante.
La faute de lashon hara (médisance) ne porta pas uniquement sur le mode de vie imposé au couple Moïse et Tsipora mais elle portait aussi sur l’importance du rôle de Moïse auprès d’HaShem rejoignant en cela le comportement de Korah de Datan et d’Aviram, démontrant que la faute découlait directement de la jalousie ressentie vis-à-vis de leur « jeune » frère… qui reçut les faveurs de l’Eternel ainsi qu’il est écrit : « de tout ce peuple, le seul qui Me soit fidèle est Moshé » (Bamidbar chapitre XII, 7 et 8). Cependant, on pourrait comprendre que Myriam et Aharon aient pu être jaloux de Moïse bien que tous trois ensemble sont cités comme acteurs principaux lors de la Sortie d’Egypte (Bamidbar chapitre XXVI, 59).
Une autre interrogation se pose : nous savons qu’accompagner un mort à son lieu de sépulture et prononcer des éloges funèbres sont des actes très importants pour quelle raison n’en est-il pas question pour aucun de ces trois fils d’Amram. Le Zohar enseigne à ce propos quelques secrets mais ce qu’il faut retenir c’est que les trois enfants d’Amram furent assistés à leurs derniers instants par HaShem qui les ensevelit Lui-même.….
En fait, ces trois personnages à la destinée peu commune ne furent pas de simples membres du peuple juif mais, ils étaient d’une dimension spirituelle peu commune : est-il nécessaire de rappeler à quel point la naissance, puis la sauvegarde de Moïse (en même temps que la sauvegarde de milliers d’autres bébés juifs mâles que Myriam et Yokhéved ont sauvé des mains des soldats de Pharaon[9]) étaient entre les mains de Myriam et à quel point Aharon seconda Moïse à chaque annonce d’une nouvelle plaie au roi d’Egypte……. Et, Myriam ne s’éteignit pas en présence de ses proches parents. Aharon, fut entouré de son fils Eléazar et de son frère mais, Moïse mourut dans un baiser de D. sans qu’aucune impureté ne le touche et c’est l’Eternel Lui-Même qui Se chargea d’ensevelir ce merveilleux et fidèle serviteur.
Caroline Elishéva REBOUH.
[1] Rabbi Moshé HaDarshan, contemporain de Rashi. Il vécut à Narbonne au milieu du XIème siècle et fait partie de l’Ecole Provençale (languedocienne plus particulièrement).
[2] הפרה האדומה מקנחת את מה שעשה העגל » »
[3] Maïmonide déclare dans son ouvrage « shemoné prakim » (les 8 chapitres) que ne furent brûlées jusqu’à la destruction du IIème Temple que 9 vaches rousses et dans la Tente du Témoignage ont été conservées les cendres de cette vache de Moïse. Lorsqu’arrivera le temps béni de la rédemption finale, ces cendres comme tout ce qui fut présent dans la tente du Témoignage seront retrouvés.
[4] Rabbi Ephraïm Shlomo de Lounschitz né en Pologne en 1550 et mort à Prague en 1619. Surnommé d’après le titre de son œuvre principale (kli yakar – ou Instrument précieux.- sur laTorah).
[5] Soit en hébreu « shive’atayim » (c’est-à-dire 7×7=49 qui correspondent aux 49 shaârey bina de Moïse qui possédait une intelligence parfaite
[6] Eliyahou ben Shlomo Zalman grand Rabbin de Vilna surnommé « HaGRA » (LeGaon Rabbénou Eliahou) 1720-1797 à Vilna.
[7] En fait il y a 5 cohanim auxquels il faut adjoindre Aharon cohen gadol et Moïse sans lequel on ne peut procéder à l’application de cette loi.
[8] Par l’intervention de l’Ange de la Mort, et incluant une notion d’impureté.
[9] Elles avaient, en tant qu’accoucheuses d’autres noms : Shifra et Poua.