Comment décidons-nous avec qui être gentil et quel bénéfice en retirons-nous ? D’après une étude réalisée par le Dr. Inbal Ben-Ami Bartal de l’École de psychologie et de l’École des neurosciences de l’Université de Tel-Aviv, spécialisée dans la compréhension des circuits cérébraux du comportement prosocial, la base biologique qui nous conduit en tant qu’être humain à un comportement comme l’empathie, le don, le partage et la coopération, est ancienne et nous accompagne depuis l’aube de l’évolution. Une remise en question de nos préjugés darwinistes.
«La base biologique qui nous conduit en tant qu’être humains à un comportement prosocial est ancienne et nous accompagne depuis l’aube de l’évolution», explique le Dr. Bartal. « Dans notre laboratoire, nous apprenons à comprendre les mécanismes biologiques qui sous-tendent ce type de comportement, et le fait est qu’il n’est pas aussi mystérieux et complexe qu’on a tendance à le penser, mais est construit de la manière la plus primitive dans nos circuits comportementaux ».
Le réseau cérébral de l’empathie
L’un des objectifs du Dr. Bartal est de comprendre comment notre cerveau appréhende la détresse des autres et comment cette information nous conduit souvent à la décision de proposer de l’aide. À cette fin, elle étudie le comportement des rats. Dans un article publié dans la revue scientifique Science, elle a montré que les rats se mobilisent pour en aider d’autres en détresse, sans aucune récompense extérieure au-delà du bien-être de ces autres rats étrangers.
Comment cela nous concerne-t-il ? D’après la théorie darwiniste, c’est le plus fort qui subsiste ; mais pour le Dr. Bartal, c’est au contraire un autre facteur qui influence notre capacité à survivre : l’aide aux autres. « Nous sommes des mammifères sociaux et, par nature, nous vivons en groupes. Pendant longemps, nous avons eu tendance à penser que le comportement prosocial était contraire à notre nature animale qui tend à la survie, mais ces dernières années, des études affirment le contraire. En fait, Darwin lui-même a reconnu l’importance de l’empathie et du comportement en faveur des autres pour la survie du groupe ».
Une motivation flexible
La question intéressante est de savoir comment l’empathie mène à la décision d’aider. « Le fait que la douleur des autres nous soit désagréable est très importante dans un groupe social. Elle conduit à une retenue de l’agressivité au sein du groupe et permet l’apprentissage social », explique le Dr. Bartal. «L’activité prosociale existe largement dans la nature, la forme la plus connue en étant le comportement parental. Les mécanismes cérébraux responsables de la prise en charge de la progéniture reposent sur des circuits neuronaux de motivation et de récompense, associés à des hormones telles que l’ocytocine. Nous sommes donc sensibles à leurs signes de détresse et prêts à tout faire pour eux. C’est également sur la base de ce mécanisme que nous agissons pour aider ceux qui avec nous n’avons pas de lien familial ».
«Ce qui est encourageant, c’est qu’après que les rats aient vécu avec un rat de la deuxième race pendant deux semaines, ils ont également aidé les rats étrangers de leur propre race. Autrement dit, la motivation pour aider repose chez les rats sur l’expérience sociale positive avec un rat du groupe, et est extrêmement flexible ».
Quel bénéfice en retirons-nous ?
« Chez les humains, le groupe social est très flexible. Nous appartenons à de nombreux groupes, et en fait, il est plus correct de penser nos vies comme des activités d’équipe, c’est-à-dire des groupes sociaux qui se cristallisent et se désintègrent pour atteindre des objectifs à relativement court terme. Nous pouvons également identifier l’appartenance à un groupe par des signes minimaux, comme la couleur d’un vêtement. Ainsi, la décision de savoir qui fait partie des « nôtres » est déterminée par l’expérience sociale. Cela laisse place à l’empathie pour les étrangers, en particulier dans une situation où il n’y a pas de concurrence ni de conflit, et où la volonté d’action prosociale l’emporte sur l’indifférence ».
Nous sommes donc programmés pour nous sentir bien lorsque nous aidons. La question est de savoir qui allons-nous aider ? Qui nous importe assez pour que nous prêtions attention à ses cris de détresse? Et qui choisissons-nous d’ignorer? Selon le Dr. Bartal, des études montrent que la connexion personnelle est la plus efficace pour motiver l’action. « Par exemple, une étude réalisée à l’Université de Stanford a montré que lorsqu’on fait appel à don pour des enfants en détresse en Afrique, une photo d’un enfant souriant et mignon avec son nom sera plus efficace que celle d’un enfant affamé. Nous devons nous connecter à quelque chose pour activer ce circuit. Apporter une contribution à la communauté améliore notre bien-être personnel, et c’est la vraie récompense. Il existe des preuves scientifiques que la manière de définir le bonheur personnel est de faire du bien à la communauté qui nous entoure ; c’est donc probablement ce que nous devons faire ».
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Photos:https://www.tau.ac.il/article/be-good