Alors que l’examen de la loi de finance pour 2021 démarre comme prévu en ce début octobre, un amendement déposé, notamment par certains Députés des Français de l’étranger dessine ce que pourrait être la fiscalité sur les revenus des Français de l’étranger.
Aligner la fiscalité des Français de l’étranger à celle des Français de France, tel était l’exercice auquel s’était attelé le gouvernement dans la loi de finance 2019, au nom d’un objectif qui sentait son idéologie et sa méconnaissance des réalités. Le projet était directement inspiré par le rapport GENETET de 2018, lui-même rédigé par une équipe aimablement fournie par Bercy.
L’idée finale est depuis longtemps de taxer selon la nationalité et non selon la territorialité, sans tenir compte du fait que les Français de l’étranger sont aussi assujettis à l’impôt de leur pays de résidence. Les « effets de bord », expression pudique du ministre des comptes publics de l’époque (G. DARMANIN) pour parler de l’effet confiscatoire, n’avaient pas tardé à faire sentir leur caractère insupportable, surtout pour les revenus les plus modestes, avec pour conséquence un moratoire gelant ces nouvelles mesures jusqu’à la fin 2020.
Pour résumer, le taux minimum d’imposition applicable aux revenus de source française des non-résidents prévu à l’article 197 A du code général des impôts (CGI) serait passé de 20 % à 30 %.
Un amendement adopté le mardi 6 octobre en commission des finances, porté notamment par les députés des Français de l’étranger suivant Madame Anne Genetet, Monsieur Alexandre Holroyd, Monsieur Pieyre-Alexandre Anglade, Madame Amelia Lakrafi, Monsieur Roland Lescure et Madame Samantha Cazebonne, proposerait l’application des taux suivants :
- Revenu inférieur à 15 018 € 0 %
- Revenu compris entre 15 018 €et 43563 € 12%
- Revenu supérieur à 43 563 € 20 %
Que dire de cet amendement ?
Fixer arbitrairement, pour ne pas dire au doigt mouillé, des taux d’imposition minimum à des revenus eux-mêmes fixés uniformément à l’échelle du monde entier revient à méconnaitre deux réalités pourtant faciles à comprendre :
- Les conditions d’existence, les capacités contributives, le pouvoir d’achat des Français de l’étranger varient considérablement, à revenu nominal égal, d’un pays à l’autre, de Madagascar au Japon par exemple.
- Fixer un taux minimum uniforme méconnait les disparités de la fiscalité locale à laquelle les Français sont assujettis dans leur pays de résidence, souvent en contrepartie de services publics moins développés, qui obligent les Français à avoir recours à des services privés qu’ils payent avec ce que le fisc français veut bien leur laisser.
- Il est inopérant de modifier un taux de retenue à la source sans renégocier, au préalable, les conventions fiscales bilatérales, sauf à vouloir multiplier les contentieux et alimenter une insécurité juridique déjà particulièrement pernicieuse.
A la discrimination qu’ils subissent déjà en matière de couverture sociale et d’enseignement français, la majorité actuelle ajoute une discrimination devant l’impôt. Si l’on comprend bien le raisonnement du gouvernement et de sa majorité, la couverture sociale et la gratuité de l’enseignement dépendent du lieu de résidence, mais pas les impôts. Mais c’est bien pire, puisque finalement moins vous bénéficiez des services publics français, puisque vous êtes à l’étranger, plus vous paierez d’impôts sur vos revenus en France !
Bien entendu, l’examen de la loi de finances ne fait que débuter. Les Sénateurs très engagés sur le sujet, auront très certainement beaucoup à dire. Nous aussi !
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