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« Psy & Coaching » mon enfant a des difficultés à l’école. Que peut-on faire ? par David Benkoël, analyste !

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Mon enfant a des difficultés à l’école. Dernièrement, il a commencer à adopter un comportement inédit : quand je lui demande de faire ses devoirs, ou même quand je l’aide à les faire, il pique des colères assez violentes et bien sûr refuse de les faire. Mon mari et moi sommes désemparés face à cette situation que nous ne maîtrisons pas. Que peut-on faire ?


Bonjour Tsipora,

Vous vous doutez pertinemment que de nombreux facteurs sont susceptibles de conduire un enfant, y compris un bon élève, à une situation d’échec scolaire. Aussi un choix doit-il être fait dans la réponse à apporter. Et quitte à réduire notre champ d’investigation, autant choisir un facteur récurrent. Oh ! Nous n’entendons nullement révolutionner la compréhension de ces situations d’échec, tragiques tant pour l’enfant que pour leur entourage. Par contre, le conseil suivant sera explicité, ce qui en renforcera la pertinence  bien sûr et, au-delà de ça, permettra d’ouvrir de nouveaux horizons dans la compréhension mais aussi dans la résolution des situations échecs en général.

Pour ce faire, il nous faut revenir sur une notion particulièrement subtile et hélas  méconnue. Vous jugerez par vous-même combien elle est fondamentale, et donc combien il faut l’avoir à l’esprit. Cette notion, c’est celle de l’endroit existentiel.

De manière générale, qu’est-ce qu’un endroit ? C’est par exemple un périmètre géographique apte à accueillir autre chose. Un terrain vague accueillera ainsi un immeuble en construction, lequel immeuble deviendra d’ailleurs un autre endroit apte à accueillir des familles, des entreprises, des manifestations de toutes sortes. En fait, un endroit est le berceau d’une certaine réalisation qui, sans lui, ne pourrait exister. Sans terrain, par d’immeuble. Sans immeuble, pas d’habitation.

Quitte à faire une légère entorse à la sémantique, un endroit n’est pas forcément géographique. Il peut être psychique. Prenons l’exemple de deux individus débattant autour d’une même question. Chacun expose ses propres arguments, écoute ceux de son interlocuteur. Au bout du compte, supposons que l’un des deux individus pense objectivement que ses idées sont les meilleures. Tout naturellement, il cherchera à convaincre l’autre. Et comment y parviendra-t-il ? Par l’éloquence, par la démonstration, par l’illustration, par la logique, pense-t-on. Eh bien, mettons que c’est exact mais insuffisant.

En fait, une idée sera acceptée si l’on parvient à ménager un endroit dans l’esprit afin de l’accueillir. Ici, l’endroit n’a évidemment plus rien de géographique, mais il garde néanmoins sa définition : le préalable pouvant accueillir ce qui dès lors pourra devenir. Ménager un endroit en son esprit semble donc être le préalable nécessaire à toute discussion digne de ce nom. Sans endroit, il n’y a aucune chance que les idées extérieures puissent susciter l’intérêt, seraient-elles finement exposées, seraient-elles même parfaitement justes.

C’est la raison pour laquelle D.ieu est appelé « Maqom »[1] par la Torah. D.ieu est essentiellement l’Endroit du monde[2], puisque Son existence même est la condition préalable à toute autre existence. Comme l’exprime le Rambam[3]s’il pouvait venir à l’esprit qu’Il n’existe pas, aucune autre chose ne pourrait exister (Yessodei haTorah 1,2).

Pour en revenir à l’homme, tout individu possède également son endroit existentiel. L’endroit existentiel de l’être, c’est donc cette autorisation subjective, cette légitimité qu’il s’accorde à lui-même pour exister.

À ce titre, une personne entreprenante, les réalisations suscitent l’émerveillement, est  d’abord une personne qui a cultivé son endroit existentiel, qui s’est autorisé la possibilité, la légitimité pour reprendre le terme, de projeter sa volonté dans le monde. Cette personne existe, à savoir elle réalise son moi intime à l’extérieur d’elle-même, parce qu’elle a déjà créé une place existentielle à cette fin, par elle-même et pour elle-même.

Un moment. Est-ce vraiment l’individu qui s’octroie la place pour exister ? Posons la question aux parents, et incidemment à vous, Tsipora. Les parents pensent-ils que leur enfant soit apte à se doter de cet endroit existentiel, mélange d’amour-propre et de joie pure[4], grâce auquel il parvient à exprimer si délicieusement ce qu’il est ? Les parents savent bien que ceci, comme tant d’autres choses chez l’enfant, relève d’un apprentissage. Oui, exister, cela s’apprend.

Aussi Tsipora, puisque vous me demandez un conseil, je vous recommanderais non pas de chercher un professeur particulier pour votre enfant, encore moins de contacter un pédopsychiatre. Pourquoi cela ? Parce que sans autres éléments en ma possession, le plus raisonnable me semble de chercher de l’aide non pas en-dehors mais bien dans la maison. Pour élargir l’idée et sans vouloir paraître inutilement philosophique, il existe une tendance à chercher les solutions loin de soi, au lieu de mobiliser a priori ses propres ressources[5]. Or quelle est cette caractéristique propre à votre enfant, qui permet l’éclosion de sa personnalité envers et contre tout, y compris les difficultés ? Comme vous l’avez compris, il s’agit de son endroit existentiel.

Et c’est donc en premier lieu sur cette notion que je vous engage à travailler. Le mieux est, j’en suis persuadé, de progresser main dans la main avec votre mari. En effet, n’oublions jamais que si aux yeux de l’enfant la maman reste la maman et le papa reste le papa, il est une troisième entité, composite, dont l’unité donne toute sa force à l’enfant. La cohérence du couple parental influe directement sur la cohérence intime de l’enfant. Un principe émerge : l’un des piliers de l’éducation est le chal.om baït [6].

À ce sujet, je vous recommanderais de vous rattacher à ces deux questions :

  • Ai-je donné à mon enfant un endroit existentiel satisfaisant ?
  • Ai-je appris à mon enfant à protéger et à développer son endroit existentiel ?

Et si un outil devait s’avérer nécessaire, permettez-moi de vous conseiller le compliment. Le compliment n’est pas une source de plaisir, en tout cas pas seulement. En un mot, le compliment est créateur. Une fois verbalisé par le parent, et plus encore s’il est accompagné d’un climat de tendresse[7], le compliment imprègne l’enfant de son potentiel positif, l’incitant littéralement à s’aimer, à prendre soin de lui, à s’exprimer, à s’épanouir, c’est-à-dire à justement affirmer et élargir son endroit existentiel.

Éprouver la saine envie de travailler, éprouver l’ambition d’être « bon à l’école », peut ne procéder que de ce facteur. Certains enfants en difficulté, ces enfants en butte avec le système scolaire avant hélas de l’être avec la société, sont des enfants dont les parents n’ont jamais veillé à développer leur endroit existentiel. Songez au passage à ces enfants ou adolescent qui « traînent dans la rue », un lieu impersonnel au possible ; n’est-ce pas parce qu’ils ne se reconnaissent pas un lieu pour eux-mêmes, en fait un lieu en eux-mêmes ?

Ainsi va l’homme. Après être descendu en ce monde une première fois à sa naissance, il doit venir au monde une seconde fois au sein de son foyer à force d’amour, de conseils, d’attention, avant de venir au monde une troisième fois en sortant de ce tunnel tortueux qu’est l’adolescence, en tant qu’adulte cette fois. Un adulte apte à faire venir au monde d’autres enfants.

David Benkoël
Analyste, je partage mon intérêt pour la construction de soi. J’aide par ailleurs des personnes en souffrance à se reconstruire.
david@torahcoach.fr

Notes

[1]  Endroit.

[2]  Et non le contraire ! Dire que le monde accueillerait D.ieu n’a pas de sens, puisque cette assertion reviendrait à dire que le fini délimiterait l’Infini.

[3]  Rabbi Moché ben Maïmon (1138 – 1204).

[4]  Si pure et par ailleurs si forte que rien n’entrave son jaillissement. Un enfant a pour trait principal d’extérioriser ce qu’il est, et cette qualité est pour l’adulte un ravissement.

[5]  Dans certains cas, il existe un lien de cause à effet de nature plutôt inconsciente : sachant ou plutôt redoutant son incapacité à gérer soi-même le problème, on se convainc que pour s’en libérer il faut être assisté. Comme si les autres étaient plus à même de comprendre puis résoudre une situation qui ne regarde que soi…

[6]  Accomplissement et sérénité du couple parental.

[7]  Pour la simple raison que l’enfant est profondément sensible à la vérité. Or parler comme on agit, agir comme on parle, c’est projeter la vérité, en référence aux Sages du Talmud qui recommandent d’être « à l’intérieur comme à l’extérieur » (Yoma 72b).

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