L’un des plus anciens atelier du monde : L’étude montre que le cuivre produit à Be’er Sheva est originaire de Jordanie, à une distance minimum de 100 km.
Selon les chercheurs, cette distance s’explique par le désir des habitants de l’ancienne Be’er Sheva de conserver le secret technologique de la production de cuivre parmi eux.
Il est possible que le four métallurgique ait été inventé en Israël.
Une nouvelle étude de l’Université de Tel-Aviv et de l’Autorité des Antiquités d’Israël révèle qu’un atelier de production de cuivre, l’un des plus anciens du monde, fonctionnait dans le quartier Neve Noy de Be’er Sheva. L’étude a duré plusieurs années, depuis la découverte de l’atelier, en 2017, lors de fouilles archéologiques préventives menées par l’Autorité des Antiquités d’Israël.
Selon la nouvelle étude, il est également possible que sur ce site on ai fait usage pour la première fois au monde d’une installation sophistiquée et révolutionnaire : le four métallurgique. L’étude a été menée par Dana Ackerfeld, Omri Yagel et le Prof. Erez Ben Yosef du Département d’archéologie et des cultures anciennes du Proche-Orient de l’Université de Tel-Aviv, en collaboration avec le Dr. Yael Abadi-Reiss, Talia Abulafia et Dimitri Yegorov de l’Autorité des Antiquités d’Israel et le Dr. Yehudit Harlavan de l’Institut géologique d’Israël Les résultats de cette étude révolutionnaire ont été publiés en octobre dans la prestigieuse revue Journal of Archaeological Science: Reports.
Selon Talia Abulafia, Directrice des fouilles de l’Autorité des Antiquités d’Israël, « les fouilles ont révélé des preuves d’une industrie familiale de la période chalcolithique, il y a environ 6 500 ans. Les découvertes surprenantes comprenaient, entre autres, un petit atelier de fusion du cuivre où l’on a trouvé des débris de creusets, petits pots en limon dans lesquels on raffinait le cuivre, ainsi que de nombreuses scories de ce métal ».
La période chalcolithique (du grec khalkos – cuivre et lithos – pierre), est ainsi nommée parce que l’homme y travaillait déjà le métal, mais les outils utilisés étaient encore des outils en pierre. Une analyse isotopique des restes de minerai dans les fragments des creusets montre que la matière première utilisée pour la production du métal dans le quartier de Neve Noy provenait de la région de Wadi Faynan dans l’actuelle Jordanie, à plus de 100 km de Be’er Sheva.
Pendant la période chalcolithique, où le cuivre a été produit pour la première fois, le métal était fondu à l’écart des mines, contrairement à la méthode qui a prévalu à travers l’histoire, et dans laquelle, pour des raisons économiques et pratiques, les fours étaient construits à proximité des mines. Les chercheurs estiment cette distance s’explique par le souhait de préserver le secret technologique.
« Il faut comprendre que la production de cuivre était la haute technologie de cette période : il n’existait pas de technologie plus sophistiquée dans le monde antique », souligne le Prof. Erez Ben-Yosef. « Quand on jette simplement des morceaux de minerai dans le feu, rien ne se produit. Certaines connaissances sont nécessaires notamment pour la fabrication de fours spéciaux, qui peuvent atteindre des températures élevées en gardant une faible quantité d’oxygène ».
Le Prof. Ben-Yosef remarque que dans l’archéologie d’Israël, il existe des témoignages d’une culture dite ghasulienne, qui tire son nom du site archéologique en Jordanie Tulaylât al-Ghassûl, où elle a été identifiée pour la première fois. Cette culture, qui s’étendait de la vallée de Be’er Sheva jusqu’au sud du Liban, est exceptionnelle par ses réalisations dans le domaine de l’art et du culte ; il suffit pour en juger de regarder les merveilleux objets en cuivre trouvés dans le trésor de Nahal Mishmar, et exposés aujourd’hui au Musée d’Israël.
Selon lui, les habitant de la vallée de l’Arava faisaient du commerce avec des Ghasuliens de Be’er Sheva et leur vendaient du minerai, mais eux-mêmes ne savaient pas comment le transformer. Même dans les villages ghasuliens le long de l’oued de Be’er Sheva, le cuivre était produit par des experts dans des ateliers spéciaux, l’analyse chimique des résidus montrant que chaque atelier gardait la ‘recette’ qui lui était propre et ne la partageait pas avec les autres. La rivière de Beer Sheva coulait probablement dans son lit à l’époque, et donc l’environnement était adapté au développement des ateliers de cuivre, dont les fours et autres installations sont faits d’argile ».
D’après le Prof. Ben-Yosef, même dans les localités chalcolithiques, où on utilisait à la fois des récipients en pierre et en cuivre, la magie de la fabrication du matériau brillant était réservée à une élite. « Au début de la révolution métallurgique, le secret de la fabrication du métal était gardé au sein d’une ‘guilde’ d’experts. Partout dans le monde, nous trouvons des sortes de quartiers de producteurs de métaux dans les localités chalcolithiques, comme celui situé à Be’er Sheva ».
L’étude comprend une discussion animée sur la question de l’existence d’une hiérarchisation et d’une stratification sociale dans cette société, qui n’était encore qu’une société rurale loin de l’urbanisation. Les chercheurs pensent que les découvertes de Neve Noy renforcent la thèse de la stratification sociale, selon laquelle il s’agissait d’une société complexe avec une élite distincte, possédant des domaines de spécialisations et des secrets professionnels, qui maintenait son pouvoir en produisant le matériau brillant, le cuivre. Les ustensiles en cuivre produits n’avaient pas d’utilité pratique, mais une signification symbolique. La hache de cuivre n’était pas utilisée comme une hache, c’était une imitation artistique et rituelle de la hache de pierre. Les objets en métal servaient pour le culte, et les outils de pierre pour l’usage quotidien ».
Ø Il est possible que le four métallurgique ait été inventé en Israël
« Lors de la première étape de la production de cuivre dans le monde, on ne trouve pas de fours, mais des creusets », explique le Prof. Ben-Yosef. « Le creuset est un petit récipient en poterie, qui ressemble à un pot de fleurs, une sorte de four portable utilisant du charbon. Ici, dans l’atelier de cuivre de Neve Noy découvert par l’Autorité des Antiquités d’Israël, nous avons montré que la technologie utilisée était basée sur de vrais fours. C’est une preuve très précoce de l’utilisation de fours pour la métallurgie, qui soulève la possibilité qu’ils aient été inventés dans notre région. Il est également possible que les fours se soient également développés ailleurs, directement à partir des creusets, car certains chercheurs considèrent que les premiers fours ne sont rien de plus que de grands creusets fixés au sol. Nous laisserons les futures découvertes décider de cette question, mais il n’y a aucun doute que la Be’er Sheva antique a apporté une contribution importante au progrès de la révolution mondiale du métal, et qu’au 5ème millénaire avant notre ère, c’était une puissance technologique dans toute la région ».
Lien vers la vidéo des fouilles : https://we.tl/t-AzKHJnnp4J
(images: Anat Rasiuk, Autorité des Antiquités d’Israël).
Légendes des photos :
- La zone de fouille de Neve Noy à Be’er Sheva (Crédit: Talia Abulafia, Autorité des Antiquités d’Israel – IAA).
- 2. Les travaux sur le site de fouille de Be’er Sheva. (Crédit: Anat Rasiuk, IAA).
- 3. Le Prof. Erez Ben Yosef de l’Université de Tel-Aviv. (Crédit: Université de Tel-Aviv).
- Talia Abulafia, Directrice des fouilles de l’Autorité des Antiquités d’Israël (Crédit : Emil Aljem, IAA).
- 5. Scories de cuivre trouvées lors des fouilles de Neve Noy. (Crédit: Anat Rasiuk, IAA)
Tomer Velmer
Porte-parole et Directeur du Département des Relations avec les médias
Université de Tel-Aviv