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Des études de l’Université de Tel-Aviv révèlent comment notre cerveau se déconnecte de la réalité pendant le sommeil et sous anesthésie

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Une série d’études effectuées par des chercheurs de la Faculté de médecine et de l’École des neurosciences de l’Université de Tel-Aviv sous la direction du Prof. Yuval Nir, portant sur le processus par lequel notre cerveau se déconnecte de son environnement pendant le sommeil et sous anesthésie, a révélé, entre autres, le rôle central de la noradrénaline, un neurotransmetteur sécrété en réponse au stress, dans notre capacité à interrompre nos réactions sensorielles et à nous endormir profondément. Selon les chercheurs, ces résultats pourraient servir à développer de nouvelles méthodes pour améliorer la qualité du sommeil notamment dans le cas des troubles d’anxiété et du syndrome de stress post-traumatique (SSPT).

« Nous avons utilisé différentes approches innovantes pour étudier le filtrage des informations sensorielles pendant le sommeil, et les mécanismes cérébraux qui déterminent le moment où nous nous réveillons en réponse à des événements externes », explique le Prof. Nir.

La première étude, publiée dans la revue Journal of Neuroscience le 1er avril dernier et conduite par le doctorant Yaniv Sela, porte sur la manière dont les neurones des différentes régions du cerveau réagissent aux divers sons pendant le sommeil et à l’état de veille, et remet en question le rôle communément admis du thalamus, structure du cerveau située entre le cortex et le tronc cérébral, dans le blocage de la transmission des signaux sensoriel au cortex. « Le rôle de déconnection du thalamus n’est pas compatible avec nos résultats », dit-il.

L’analyse de base des sons reste la même pendant le sommeil

Utilisant des modèles murins, le chercheur a découvert que les réactions aux sons des neurones du cortex auditif étaient similaires à l’état de veille et pendant le sommeil. Par contre, il a constaté que les cellules nerveuses du cortex périrhinal, lié à la perception consciente et aux processus de mémoire, présentaient des réactions beaucoup plus faibles pendant le sommeil.

Yaniv Sela« L’analyse de base des sons reste la même pendant le sommeil, mais le cerveau endormi a du mal à créer une perception consciente du stimulus », ajoute Sela. « De plus, alors que les réactions primaires immédiates sont préservées dans le sommeil, celles qui nécessitent une communication entre les différentes régions du cortex sont fortement perturbées ».

La deuxième étude, publiée le 8 avril dans la revue Science Advances, a été menée par la doctorante Hanna Hayat du laboratoire du Prof. Nir, en collaboration avec les Prof. Tony Pickering de l’Université de Bristol, Ofer Yizhar de l’Institut Weizmann et Eric Kremer de l’Université de Montpellier. Elle a permis de constater le rôle central du locus coeruleus, un minuscule noyau du tronc cérébral, principale source de sécrétion de noradrénaline dans le cerveau, dans notre capacité à nous déconnecter de notre environnement pendant le sommeil.

Un ‘interrupteur’ qui régule la profondeur du sommeil

« La capacité de se déconnecter de l’environnement, de manière réversible, est une caractéristique centrale du sommeil », explique Hanna. « Nos résultats montrent clairement que la noradrénaline produite par le locus coeruleus joue un rôle crucial dans cette déconnexion en se maintenant à un très faible niveau d’activité quand nous dormons ».

Dans cette étude, les scientifiques ont également utilisé des modèles murins pour déterminer le niveau d’activité du locus coeruleus pendant le sommeil et repérer quels sons pouvaient, le cas échéant, réveiller les rongeurs.

Ils ont découvert que le niveau d’activité du locus coeruleus chez les animaux permettait de prévoir avec précision s’ils se réveilleraient en réaction aux sons. Les chercheurs ont ensuite neutralisé l’activité de cette région du cerveau par l’utilisation de l’optogénétique, méthode innovante associant l’optique et la génétique qui exploite la lumière pour contrôler l’activité neuronale, constatant qu’alors les souris ne se réveillaient plus que difficilement en réponse aux sons.

« Lorsque nous avons augmenté les niveaux de noradrénaline du locus-coeruleus, les souris se sont réveillées plus fréquemment au bruit, alors que lorsque ces niveaux diminuaient, elles ne se réveillaient plus que rarement », explique Hayat. « Nous pouvons donc dire que nous avons identifié un puissant ‘interrupteur’ qui régule la profondeur du sommeil malgré les stimuli extérieurs ».

« De plus, nos résultats suggèrent que l’hyperexcitation chez certaines personnes qui ont le sommeil léger, ou pendant les périodes de stress, peut être le résultat d’une activité incessante de la noradrénaline pendant le sommeil alors qu’elle devrait être minimale ».

Contrôler le niveau de conscience sous anesthésie

La troisième étude, publiée le 12 mai dans les Actes de la National Academy of Sciences (PNAS), réalisée conjointement par le doctorant Aaron Krom du laboratoire du Prof. Nir, également médecin au Centre médical Hadassa de l’Université Hébraïque et le doctorant Amit Marmelshtein de l’Ecole des neurosciences, portant sur notre réaction à l’anesthésie, a constaté que l’effet le plus significatif de la perte de conscience est le dérèglement de la communication entre les différentes régions corticales.

Elle est le fruit d’une collaboration entre le Prof. Nir, le Prof. Itzhak Fried et le Dr. Ido Strauss de la Faculté de médecine de l’UTA et du Centre médical Sourasky à Tel-Aviv, ainsi que d’une équipe de l’Université de Bonn.

« Malgré l’utilisation courante de l’anesthésie en médecine, nous ne comprenons toujours pas comment elle entraîne une perte de conscience ; il s’agit d’une question majeure de la recherche biomédicale qui reste ouverte », rappelle le Dr. Krom.

Dans le cadre de l’étude, les chercheurs ont enregistré l’activité cérébrale de patients épileptiques qui s’étaient avérés peu ou pas réceptifs aux interventions médicamenteuses. Les patients ont été hospitalisés pendant une semaine, et on leur a implanté des électrodes pour localiser l’origine de leurs crises dans le cerveau. Ils ont ensuite été anesthésiés pour le retrait des électrodes, et leur activité neuronale enregistrée alors qu’on leur faisait entendre des sons avec des écouteurs. De plus, il a été demandé aux participants d’effectuer une tâche avant leur anesthésie jusqu’au moment de la perte de connaissance, ce qui a permis aux chercheurs d’examiner l’évolution de l’activité de leurs neurones cérébraux en réaction aux sons au moment même où ils ont perdu connaissance.

« Nous avons constaté que la perte de conscience perturbait la communication entre les régions corticales de telle sorte que les sons ont déclenché des réactions du cortex auditif primaire, qui n’ont pas pu être transmises de manière fiable aux autres régions du cortex », explique Marmelshtein. « Il s’agit de la première étude qui examine comment l’anesthésie et la perte de conscience affectent les réponses sensorielles au niveau des neurones chez l’homme. Nous espérons que nos résultats serviront de base aux recherches futures, ainsi qu’à l’amélioration des processus d’anesthésie et au développement d’outils capables de contrôler le niveau de conscience sous anesthésie, et dans d’autres cas où l’état de conscience est altéré tels que les états végétatifs et la démence grave ».

« Ces études font progresser notre compréhension de la déconnexion sensorielle pendant le sommeil et l’anesthésie », conclut le Prof. Nir. « Les troubles du sommeil sont un problème de santé majeur fréquent dans le vieillissement, ainsi que dans de nombreux troubles neurologiques et psychiatriques. Il est important de vérifier si nos résultats sur les niveaux de noradrénaline peuvent expliquer l’hyperexcitation qui caractérise les troubles d’anxiété et le SSPT, par exemple, et si c’est le cas, de s’appuyer sur ces résultats pour développer de nouvelles méthodes pour améliorer la qualité du sommeil dans ces circonstances ».

Photos:

1. Le Prof. Nir dans son laboratoire à l’Université de Tel-Aviv (Crédit: Université de Tel-Aviv)

2. Yaniv Sela (Crédit: AFTAU)

3. Hana Hayat (Crédit AFTAU)

4. Le Dr. Aaron Krom (Crédit AFTAU)

5. Amit Marmelshtien (Crédit: AFTAU)

Source : https://www.ami-universite-telaviv.com

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