Les textes sacrés qui dissertent sur l’époque messianique, ou sur « la fin des temps » sont multiples. Il peut s’agir de textes prophétiques, ou d’extraits du Zohar ou de la Guemara ou d’autres comme des textes écrits par des cabalistes tel que le Ari zal (Rabbi Itshak Louria)
La Tradition cite deux Messies l’un désigné comme étant « fils de Joseph » et le second « fils de David« .
Cet article a la prétention de vouloir exposer la différence entre ces deux personnes et leur rôle.
LE MESSIE FILS DE JOSEPH (משיח בן יוסף) : De quel Joseph s’agit-il tout d’abord ?
Cet homme descendra de la tribu d’Ephraïm, lui-même fils de Joseph. Ephraïm est l’aîné[1] de Joseph lui-même aîné[2] de Rahel. Joseph fut le second du Pharaon de cette époque et fut chargé de s’occuper de toutes les questions de logistique du pays d’Egypte et des conflits qu’il sait gérer.
Plus tard, celui qui succéda à Moshé Rabbénou fut Josué (Yéhoshouâ) de la tribu d’Ephraïm. Encore plus tard, le roi Shaoul, appartint, lui, à la tribu de Benjamin (fils de Rahel). Ceci pour dire que la plupart des exégètes qui ont traité du sujet des temps messianiques ont dégagé les grandes lignes du « profil » du Mashiah ben Yossef : il aura pour cible de conquérir, d’une manière ou d’une autre, des terrains et d’élargir le territoire d’Israël.
Midrash Tanhouma[3] : Le Mashiah ben Yossef aura comme emblème un taureau (écusson de la tribu de Joseph)[4] tandis que le Messie fils de David aura pour écusson l’effigie d’un âne.
Le Maharal de Prague[5], quant à lui, pense qu’il est possible d’assimiler le personnage du Mashiah ben Yossef à un cœur, et qui suit les pulsions d’un cœur (lev) alors que le Mashiah ben David est assimilé à un « cerveau » (moah).
Le Gaon de Vilna[6] écrit que la différence des deux Messies sur le plan idéologique est sensible : de même que Joseph a su régler toutes les questions matérielles en Egypte, on attend du « fils de David » qu’il vienne à bout de toutes les questions spirituelles de l’époque où il se manifestera.
Le Rav Kook[7] suit le raisonnement du Maharal et pour lui aussi, le Mashiah ben Yossef est assimilable à un cœur. Pour ce grand penseur des temps modernes pourrait-on dire, le Mashiah ben Yossef domine par ses facultés « matérielles » alors que le second est beaucoup plus « spirituel ».
D’après toute la littérature se rapportant aux deux Messies, le Mashiah ben Yossef est destiné à mourir (à être assassiné plus précisément) au temps de la Guerre de Gog et Magog. En ce temps il y aura une très grand désordre et le « chef » du « erev rav » [8] sera tué lui
LE MESSIE BEN DAVID (משיח בן דוד) : Vers la fin de la Meguilat Ruth, nous pouvons lire (chapitre 4 versets 18 à 22) comment Boaz qui épousa Ruth descendait de Juda et comment il fut l’ancêtre de David (le Roi David). Pourquoi ce Mashiah se réclame-t-il de la descendance de David et pas de Juda fils de Jacob ?
Juda détenait le droit d’aînesse d’entre les fils de Léa car Réouven qui était l’aîné de facto fut déchu de son titre après la faute qu’il commit avec la femme de son père, Bilha. L’aînesse devait revenir de ce fait à Shim’ôn ou à Lévy mais tous deux commirent aussi un crime multiple en assassinant les hommes de Shekhem dont le prince avait séduit Dina. L’aînesse reposa en conséquence sur les épaules de Judas 4ème fils de Jacob et Léa. Juda ayant eu des jumeaux avec Tamar sa belle-fille, l’aîné fut Perets etc…
D’autre part, Boaz, épousa une Moabite, originaire donc d’un peuple issu d’une union illicite entre Loth et sa fille.
David fut un homme d’esprit et d’une âme élevée correspondant aux caractéristiques convenant à un Mashiah ben David.
La Guemara Sanhédrin stipule : אין בן דוד בא אלא בדור שכולו זכאי או שכולו חייב….: le « Fils de David » (le Messie) ne se dévoilera que dans une génération entièrement innocente ou entièrement coupable. Le commentateur précise que pour pouvoir distinguer si la génération est innocente ou coupable il est nécessaire qu’il dispose de gènes du bien et du mal pour pouvoir faire la différence entre le bien et le mal. Auquel cas, il est utile que dans la généalogie du Messie doit s’inscrire un membre d’une origine imparfaite comme le fait que l’un des membres de la famille soit « étranger » (zar) comme l’illustre la présence de Ruth la Moabite…
Tout au long de l’histoire juive se sont distingués quelques personnages « troubles » qui voulurent s’imposer et s’affirmer comme Messie. Ce furent des imposteurs ou faux-messies entre autres : Solomon Molco[9], Shabbataï Zvi[10], Jacob Frank[11] et d’autres (on en dénombre 14…) Je vous propose d’étudier ce dossier ensemble dans les semaines à venir si D le veut bien… Certains de ces personnages offrent un portrait sympathique, pour d’autres, la folie les accompagna durant leur périple. Parfois ils furent assoiffés de gloire, d’autres fois ils souffrirent d’un esprit dérangé par une étude approfondie de textes ésotériques trop approfondie pour eux, ils furent usurpateurs mais il convient de connaître leur parcours.
Caroline Elishéva REBOUH
[1] La Guemara statue que l’aîné de jumeaux est celui qui sort du ventre de sa mère en deuxième position car il est dit que celui qui a été conçu le premier sortira en second et, en conséquence, celui qui sortira en premier est celui qui a été conçu en second. Ce qui fait dire aux commentateurs qu’en réalité, Esaü ne fut pas réellement l’aîné mais le puîné et donc Rebecca savait que le droit d’aînesse appartenait effectivement à Jacob.
[3]Tanhouma bar Abba Amora de la 5ème génération, auteur d’un éminent midrash portant son nom.
[4] Voir Parashat Vayehi où Jacob bénit Joseph. Bereshit chapitre 49 versets 1 à 26.
2 Acronyme de Morénou HaRav Yehouda Leb ben Betsalel né en 1520 à Poznan en Pologne et mort en 1609 à Prague en Tchéquie. Rabbin et cabbaliste, auteur de nombreux ouvrages et créateur du « Golem ».
[6] Rabbi Eliahou ben Shlomo Zalman surnommé Gaon de Vilna, né en 1720 à Vilna où il mourut en 1797.
[7] Abraham Itshak HaCohen Kook, né à Griva (Lettonie) en 1865 et décédé à Jérusalem en 1935. Rabbin, philosophe, décisionnaire rabbinique et cabbaliste. Il fut le premier Grand Rabbin Ashkenaze à l’époque du mandat britannique.
[8] Erev Rav se traduit par la tourbe nombreuse c’est une partie du peuple juif constituée de personnes qui sont sorties d’Egypte avec le peuple juif et c’est de là que sont issus les grands perturbateurs du peuple et ce, jusqu’à aujourd’hui.
[9]1500-1532
[10] 1626-1676
[11] 1726-1791