Régler une succession n’est pas un choix, mais un parcours du combattant effectué dans la douleur de la perte d’un proche. Dans le contexte d’une expatriation, les démarches sont rendues plus lourdes par l’éloignement géographique entre le défunt et ses proches. Au surplus, le temps passé à l’étranger et l’apprentissage d’un nouveau système juridique dans le pays d’accueil éloigne des modalités françaises du règlement d’une succession.
1. Informer l’entourage du défunt
C’est souvent l’entourage du défunt qui vit à proximité ou le parent ayant le lien familial le plus proche qui sera informé en premier du décès et qui devra relayer cette information, voire même publier un avis de décès dans un quotidien national.
Dans l’hypothèse d’un majeur sous protection, il faut informer le tuteur, le curateur ou le juge des tutelles du décès.
2. Déclarer le décès à l’état civil dans les 24 heures suivant le décès
La déclaration de décès doit être faite à la mairie du lieu du décès, au moyen des pièces suivantes : le certificat médical constatant le décès, le livret de famille ou pièce d’identité du défunt, la pièce d’identité de la personne déclarante.
Lors d’un décès dans un centre de soins, une maison de retraite ou un EHPAD, l’établissement effectue gratuitement cette démarche à la mairie.
3. Premières démarches administratives à accomplir dans les 7 jours du décès
Dans l’hypothèse où un contrat d’assurance-vie existe et désigne une personne en qualité de bénéficiaire, il est possible de se rapprocher de la compagnie d’assurance concernée et de débloquer les fonds considérés comme « hors succession » à condition d’en conserver tous les justificatifs.
S’agissant des banques, il n’est pas utile de se précipiter pour les informer du décès car elles vont immédiatement bloquer les comptes ce qui entrainera un rejet des prélèvements automatiques et une augmentation du passif.
Afin d’éviter que les biens de la succession ne puissent disparaitre, il est possible de demander la pose de scellés sur le domicile du défunt ou un coffre-fort à la banque. Cette demande est à adresser rapidement et par écrit au greffier en chef du tribunal d’instance (lequel sera le tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020).
Il faut également informer l’employeur du défunt, le tribunal d’instance en cas de PACS, les ASSEDIC, la société d’assurance pour savoir si un contrat d’assurance décès a été souscrit, la mutuelle, le bailleur, les caisses de retraite, le syndic de copropriété, le locataire éventuel, le juge des tutelles si le défunt était un majeur incapable placé sous une mesure de protection.
4. Démarches à effectuer dans les 30 jours
Contacter un notaire pour régler la succession et éventuellement un avocat en droit de la famille : quel est leur rôle ? quelles sont les étapes de la succession en France ?
En France, les successions sont réglées par un notaire qui est un officier public, choisi librement par les héritiers. Il peut s’agir du notaire de famille, proche du lieu de vie du défunt mais cela n’est pas obligatoire puisque les notaires ont en France une compétence sur tout le territoire national.
En principe, un seul notaire suffit à régler une succession, mais en cas de contentieux entre les héritiers et/ou légataires, un second notaire pourra intervenir.
Le notaire va ainsi régler juridiquement la succession du défunt et identifier les héritiers et/ou légataires puis constater la transmission de ses biens à leur profit, tout en réglant les aspects fiscaux de la transmission du patrimoine du défunt.
Lorsqu’on est expatrié, avoir recours aux services d’un avocat spécialisé en droit de la famille peut précisément faciliter la communication avec l’étude notariale mais également avec les cohéritiers.
L’avocat conseil peut être mandaté par un ou plusieurs cohéritiers expatriés afin de centraliser les transmissions de documents, assister aux rendez-vous d’expertise, faciliter le dialogue malgré la distance et les décalages horaires. Un premier rendez-vous chez le notaire permettra de faire le point sur la situation familiale et patrimoniale du défunt. Ce rendez-vous d’ouverture de succession est crucial en ce qu’il permet de déterminer les étapes du règlement successoral à venir et de fournir les explications nécessaires aux héritiers, parfois noyés par tous les impératifs administratifs.
C’est l’occasion de rassembler les pièces nécessaires au règlement de la succession et d’échanger. S’il n’est pas possible d’être physiquement présent au rendez-vous d’ouverture, il peut être envisagé d’organiser une conférence téléphonique ou par visio-conférence type Skype. En cas d’impossibilité de se déplacer, l’avocat dûment mandaté par les héritiers, peut se rendre chez le Notaire, prendre les informations utiles et agir au nom de ses clients pour signer des documents.
Dans un premier temps, le notaire identifie les parties qui sont impliquées dans la succession. Il interroge ainsi le Fichier Central des Dispositions de Dernières Volontés pour savoir si le défunt n’a pas laissé un testament et si un des héritiers n’a pas d’adresse connue, il sera alors recherché au moyen d’un généalogiste.
Une fois l’ensemble des pièces relatives aux personnes collecté, il est dressé un acte de notoriété. Ce dernier permet d’établir la dévolution successorale en prenant en compte la qualité d’héritiers des uns et de légataires des autres le cas échéant, le tout en respect des dispositions qu’auraient pu être prises par le défunt par voie testamentaire. L’acte de notoriété permet entre autres de pouvoir débloquer les comptes bancaires qui ont appartenu au défunt, alors bloqués depuis le décès. Toutefois, si un des héritiers est résident fiscal à l’étranger, le déblocage des comptes pourra s’effectuer uniquement au profit de l’administration fiscale afin de régler les droits de succession, ou à défaut seulement après avoir reçu le certificat d’acquittement de ces droits.
L’avocat peut signer cet acte de notoriété grâce au mandat confié par ses clients expatriés.
Le centre des impôts devra être informé du décès. La déclaration de revenus du 1er janvier à la date du décès – formulaire n°2042- doit être déposée l’année suivante dans les délais légaux.
En parallèle des opérations effectuées par le Notaire, d’autres démarches administratives doivent être effectuées :
Contacter la CPAM pour obtenir le « capital décès », la CAF si le défunt percevait des allocations, prévenir les organismes « payeurs » afin de résilier les contrats (sociétés d’assurance, crédit, eau, gaz, électricité, fournisseur téléphone), interrompre la redevance audiovisuelle et les contrats d’abonnement.
Attention toutefois à ne pas résilier les contrats d’assurance habitation et automobile si un véhicule est toujours utilisé.
Si le défunt était porteur de parts dans une société, il faut penser à désigner un mandataire pour la poursuite de l’exercice social.
5.Dans le cadre de la succession : temps de réflexion sur les décisions à prendre
Lorsque la succession est soumise à la loi française, il existe trois modes d’acceptation ou renonciation à la succession
- L’acceptation pure et simple de la succession, l’hériter ou le légataire reçoit sa part d’héritage et doit payer les dettes du défunt dans la limite de ses droits dans la succession ;
- L’acceptation à concurrence de l’actif net, l’héritier c’est alors tenu des dettes du défunt qu’à concurrence de la part recueillie dans la succession. Si les dettes dépassent l’actif, l’héritier ne sera pas contraint de les payer sur ses biens personnels,
- La renonciation à la succession, de sorte que celui qui choisit cette option n’aura jamais acquis la qualité d’héritier.
Pour la grande majorité, les héritiers ou les légataires acceptent purement et simplement la succession. Néanmoins, il s’agit d’une décision à mûrir en concertation avec son Notaire.
Une fois le choix effectué, la transmission des biens peut être opérée. Pour les biens immobiliers présents dans l’actif de la succession, le notaire doit rédiger des attestations immobilières afin de transférer le titre de propriété au nom des héritiers.
Enfin, il peut être procédé à un partage du patrimoine du défunt entre les héritiers de sorte que ces derniers ne restent pas en indivision, ce qui facilite ainsi la gestion des biens dans l’avenir.
6. Les droits du conjoint survivant
Selon la configuration familiale, le conjoint survivant a des droits dans la succession du défunt. La loi française a réhaussé ses droits au fil des années.
En présence d’enfants communs, le conjoint bénéficie d’une option entre le quart en pleine propriété des biens du défunt et l’usufruit de la totalité des biens de ce dernier.
Lorsque le défunt laisse des enfants nés d’une autre union, le conjoint survivant n’a plus de choix : il recueille la propriété du quart des biens du défunt.
Toutefois, les droits du conjoint survivant peuvent avoir été étendus si le défunt avait pris des dispositions de dernières volontés en sa faveur via une donation entre époux ou un testament.
Enfin, si le défunt ne laisse pour lui succéder aucun descendant, le conjoint survivant a la qualité d’héritier réservataire et reçoit donc au minimum un quart en pleine propriété de la totalité des biens du défunt. Néanmoins, selon qui succède effectivement au défunt, le conjoint survivant pourra être alloti de plus du quart en pleine propriété.
7. La fiscalité des droits de succession
Même si l’on vit à l’étranger depuis plusieurs années, lorsque la succession se déroule en France des droits de succession pourront être dus par les héritiers.
La question de la fiscalité est importante en ce qu’elle représente un coût certain pour les héritiers. En France, sous reserve des conventions fiscales, les droits de succession sont dûs dans trois cas de figure :
- Domicile du défunt situé en France, l’ensemble du patrimoine mobilier et immobilier situé en France et à l’étranger sera taxable en France,
- Domicile du défunt hors de France, seuls les biens situés en France seront taxables en France,
- Domicile fiscal de l’héritier en France au moment du décès ou au moins six ans durant les dix dernières années précédant la transmission, des droits de succession seront dûs à la fois sur les biens situés en France et à l’étranger.
En conséquence, la fiscalité ne doit absolument pas être négligée car elle constitue une étape importante dans le règlement d’une succession.
En termes de délai, lorsque le défunt résidait en France, le paiement des droits de succession et la déclaration de succession doivent être régularisés dans les six mois suivant le décès ou dans l’année si le décès est survenu hors de France. Si ces délais sont dépassés, des intérêts de retard seront dus à l’administration fiscale par les héritiers.
Si le conjoint est exonéré de droits de succession, il importe par la suite de savoir à combien s’élève les droits de mutation à titre gratuit, autrement dit combien devront payer les héritiers.
Entre parents et enfants, la fiscalité des successions varie de 5% à 45% après l’application d’un abattement personnel de 100.000 euros
En ligne collatérale, à savoir entre frères et sœurs, les droits s’élèvent à 35% et 45% selon les tranches ; en ligne collatérale jusqu’au 4ème degré, les droits s’élèvent à 55% ; enfin entre non parents, les droits s’élèvent à 60%.
A noter que selon le pays de résidence de l’héritier/ légataire des droits de succession peuvent y être dus. Dans ce cas, il suffit de se rapprocher d’un fiscaliste local pour connaître les conséquences fiscales d’une succession à l’étranger dans son pays de résidence.
8. Dernière étape : la signature des actes notariés
Le règlement d’une succession passe nécessairement par la signature d’actes notariés, à savoir des actes reçus par devant notaire.
La présence de tous les signataires n’est pas une condition sine qua non puisqu’il est possible aujourd’hui d’effectuer ces signatures à distance par le biais d’une procuration.
Dans la plupart des cas, la procuration à produire est dite sous seing privé. La procuration peut être confiée à tout collaborateur de l’étude, à un avocat ou à des héritiers présents le jour de la signature. En outre, pour s’assurer de l’authentification du signataire, il devra être procédé à une certification de signature devant les autorités locales compétentes. Il peut s’agir d’un notaire dans certains pays comme en Belgique, Espagne, Italie ou bien d’un notary public comme aux Etats-Unis dont la signature devra faire l’objet d’une apostille pour être valable en France.