Le voile de mystère entourant le pipeline qui reliait l’Iran à Israël à l’époque du Chah est maintenu en place. La commission des Affaires étrangères et de la Défense du Parlement israélien a prolongé de cinq années supplémentaires l’interdiction de révéler la moindre information sur cette installation officiellement dénommée Eilat-Ashkelon Pipeline Co (EAPC) sous peine d’être accusé de se livrer à de l’espionnage et d’être passible d’une peine de quinze ans de prison.
Cette installation est le résultat direct d’un accord conjoint signé entre Israël et l’Iran en 1968. Elle visait à transférer du pétrole iranien vers la Méditerranée via le territoire israélien. Les deux gouvernements ont fondé l’EAPC comme partenaires égaux au moment où l’Egypte bloquait le passage des navires à destination d’Israël par le canal de Suez. La compagnie a construit un pipeline reliant le port d’Eilat, sur la mer Rouge, au port d’Ashkelon, sur la Méditerranée, pour contourner le canal.
Le pipeline devait servir à approvisionner Israël en pétrole, mais aussi à assurer des exportations de brut iranien vers l’Europe. Les liens militaires et de renseignements très étroits entre les deux pays ont toutefois été rompus à la suite de la révolution khomeiniste en 1979. Israël a refusé de verser des indemnités à la République islamique pour compenser l’arrêt du fonctionnement du pipeline. Depuis, les deux parties sont engagées dans une interminable procédure d’arbitrage international portant sur plusieurs milliards de dollars. La franchise de l’EAPC prévue par les accords est arrivée à expiration en mars dernier, après 49 ans.
Il a été décidé de créer une nouvelle compagnie l’«Europe Asia Pipeline Co», qui a pris le relais en septembre. Les responsables israéliens espèrent que ce changement va leur permettre de ne pas être contraints de respecter les engagements financiers vis-à-vis de l’Iran. Ces dernières années, la société a discrètement diversifié ses activités. Le pipeline a été modernisé pour permettre un flux de pétrole en sens inverse, ce qui permet à du brut de mer Noire et de la mer Caspienne d’être transféré vers l’Asie depuis le terminus en mer Rouge.
La compagnie emploie 350 salariés actuellement. Depuis sa création, elle bénéficie d’un statut tout à fait spécial. Ses comptes et son fonctionnement ne sont pas soumis à l’autorité du bureau du contrôleur de l’Etat, alors que cette institution est chargée de contrôler la gestion de toutes les entreprises publiques. Autre caractéristique exceptionnelle, la société est totalement exemptée d’impôt sur les bénéfices.