Le chaud lent est le plat traditionnel du Samedi midi qui mijote très lentement depuis le vendredi soir a l’entrée du shabbat. Appelée par les ashkénazes tcholent ,chez les séfarades d’Afrique du nord c’est la schena,tafina ou dafina . Aucune appellation contrôlée [TAP].
Chez nous, dans la petite ville d’ Ain Temouchent dans l’Oranais ou j’ai passé une partie de mon enfance, nous avions l’habitude de porter notre tafina le vendredi après midi dans un four banal pour aller la récupérer le samedi avant le repas de midi. Cette importante tache m’était confiée depuis l’âge de sept ans.
J’éprouvais une certaine fierté au retour de l’école le samedi matin, a revenir avec une marmite très chaude dans un couffin , remettre la tafina a ma maman, ce plat fumant, enveloppé de senteurs de la reine de sabah, qui la posait a la satisfaction de tous qui attendaient avec impatience. Lorsque la tafina apparaissait, le cercle de famille applaudissait a grands cris comme disait le poète.
Le patron du four banal qui était un boulanger averti préparait un pain spécial appelé metlor, que les snobs dénommaient pain indigène, avait développé une méthode originale brevetée . Il avait confectionné avec des bouts de fil de fer différentes formes, des ancêtres de logos. Il prenait une petite quantité de pâte qu’il collait a la marmite, apposait un de ces logos dessus et nous le remettait,.
Le lendemain il fallait présenter cette forme pour pouvoir obtenir sa marmite. Un samedi matin ,au moment de sortie de l’école , l’instituteur me demanda de l’aider a ranger des livres .
J’arrive très vite, en courant ,au four banal, je présente la forme pour récupérer notre repas shabbatique. Le boulanger revint avec une marmite différente de la notre.
Je lui dit immédiatement qu’il a commis une erreur. Impossible me dit il,c’est la seule qui restait, je réalise de suite qu’il s’agit d’une erreur mais ajoute t’ il ,prends la sinon vous allez faire ramadan.
Il me la place dans le couffin . Je pars angoissé, fébrile, timoré, préoccupé. Que va dire ma maman? J’arrive a la maison tout penaud . J’essaye de m’ expliquer. Mission Impossible.
Résignée mais très en colère ma mère ouvre la marmite et c’est la que le drame commence !
Une tafina sans oeuf me dit elle, elle qui pensait toujours a leur faire prendre une couleur spéciale en les faisant bouillir avec une pelure d’oignon, pas sa farce spéciale de viande hachée, le coclo, et pendant une demi heure me voila torturé a cause de cette dafina qui ne ressemblait en rien a celle de ma mère.
Au bout de celle longue séance d’accusations dont je n’étais absolument pas coupable, mon père réussit a me sauver de cette situation
Avec son accent yiddish qu’il gardât jusqu’ au dernier jour de sa vie, un sourire au coin des lèvres, il dit a ma maman. Au lieu de réprimander notre fils, tu devrais le féliciter car grâce a lui ,nous savons maintenant que tu fais la tafina la plus succulente,une tafina incomparable et puis tu as du rendre une autre famille heureuse. Ma maman souriait.
Enfin j’ étais sauvé
SHABAT SHALOM
Daniel Gal
diplomate ayant représente Israël durant près de 40 ans dans plusieurs continents Afrique Asie, Europe Amérique du nord et Amérique latine. Il est a la retraite avec le grade d’ambassadeur. Depuis sa retraite il se consacre a défendre l’image d’Israël en publiant des articles aussi bien dans les médias que dans des programmes de radio et télévision.