La Saga des juifs de France depuis 1945(9) Les juifs de France durant les années giscardiennes
L’arrivée au pouvoir d’un jeune président, Valéry Giscard d’Estaing, chef d’un parti libéral, ne met pas fin à la poursuite de la politique pro-arabe amorcée par ses prédécesseurs. La poursuite de ces orientations favorise la cause palestinienne ainsi que la coopération militaire étroite avec les pays arabes, ne fait donc qu’accentuer encore plus la méfiance ressentie par le gouvernement israélien à l’égard de la France lors de la seconde moitié des années 1970.
Pour expliquer les options antisionistes du nouveau président il faut insister sur les causes familiales, la nouvelle orientation géopolitique en faveur de l’OLP et les raisons commerciales avec les ventes d’armes pour compenser les importations en hydrocarbures, destinées à l’Arabie saoudite et à l’Irak et surtout la construction d’une centrale nucléaire en Irak.
Le 22 novembre 1974, la France vote la reconnaissance de l’OLP au sein de l’ONU en tant que membre observateur, ainsi que les « droits inaliénables du peuple palestinien en Palestine », y compris le droit à l’indépendance et à la souveraineté nationale.
Giscard d’Estaing ne cesse de dénigrer les accords de Camp David en multipliant les entraves pour l’application des principes et de soutenir à fond les résolutions du monde arabe à l’ONU. Ainsi il refuse tout contact direct avec le nouveau premier ministre israélien, Menahem Begin[1] qui a signé la paix avec l’Egypte.
La Déclaration de Venise, signée par la CEE, a pour conséquence l’isolement progressif d’Israël et la radicalisation des positions de ses ennemis. En 1976, la France apporte un faible soutien à la cause des chrétiens du Liban, menacés d’une politique d’épuration. L’asile politique à l’ayatollah Khomeiny en France est accordé et on favorise son retour en Iran.
La politique anti-israélienne de Giscard d’Estaing accélère un phénomène d’adhésion totale à Israël. Les juifs de France renforcent leur identité développant le réseau scolaire juif : à la fin des années 1970, on compte 47 groupes scolaires juifs : 2 écoles de l’AIU, 15 écoles communautaires, 4 écoles consistoriales, 6 écoles Loubavitch, 7 écoles de l’ORT, 11 écoles orthodoxes, 2 écoles Ozar Hatorah. En 1980 : le FSJU créé le Centre juif d’études pédagogiques (CEJEP), qui a pour vocation de préparer les futurs enseignants à intégrer une école juive.
A la fin des années 70, la mise en cause du génocide des Juifs émerge dans l’espace public. En octobre 1978, l’ancien commissaire aux Questions juives de l’État français, Louis Darquier de Pellepoix, donne depuis l’Espagne un entretien à L’Express. Il y déclare : « A Auschwitz, on n’a gazé que des poux ». En fait, le négationnisme prend un réel essor dans un contexte où s’achève la période dite d’occultation consciente ou non consciente de l’extermination des Juifs. Mais au même moment, le négationnisme est particulièrement virulent en France. Emmenés par Faurisson, les négationnistes se consacrent totalement à leur combat. À la fin des années 70, Faurisson et les Vieilles taupes passent de la dénonciation d’Auschwitz comme alibi du capitalisme à la définition radicale d’un mythe.
La fin du mandat de Giscard d’Estaing est assombri par le sinistre ‘attentat de la rue Copernic à Paris en septembre 1980, qui fait quatre morts, aggrave cette incompréhension, suite au célèbre « lapsus » du Premier ministre Raymond Barre : « Cet attentat odieux a voulu frapper les israélites qui se rendaient à la synagogue, il a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic ».
Henri Hajdenberg, à la tête du Renouveau juif, appelle à voter contre la politique proche-orientale de Valéry Giscard d’Estaing, à l’élection présidentielle française de 1981. A suivre..
Prochain épisode : Mitterrand et les juifs (10)
HAG SAMEAH LE PESSAH CACHER ! L’An prochain à Jérusalem !
Joel Guedj Historien pour Ashdodcafe.com
[1] La victoire du leader du Likoud en 1977 met fin à près de 30 ans de gouvernement dirigé par le parti travailliste