Au début des années vingt, Vladimir Ivanovitch Vernadski, membre de l’Académie des Sciences de Russie et père de la modernité scientifique soviétique, formalisa ce que nous appelons aujourd’hui l’écosystème, qu’il nomma alors la biosphère, processus dynamique auto-entretenu depuis 4 milliards d’années et sans qui la vie sur notre chère planète serait impossible. Durant le temps qu’il passa à Paris comme enseignant à la Sorbonne, il fit état pour la première fois d’un autre concept : la noosphère.
Le terme noosphère, vient du grec nouss qui signifie esprit. Nous pouvons nous représenter la noosphère, comme une couche, une pellicule de faible épaisseur, qui ‘’matérialiserait’’, en quelque sorte, toutes les consciences de l’humanité, et aussi sa capacité à penser. Une nappe pensante. Un network que l’on peut facilement se figurer aujourd’hui grâce à l’avènement d’Internet.
Seulement cette noosphère est constituée de toutes nos pensées, les plus lumineuses mais aussi les plus sombres. Celles produites par ce que Jung appelait… notre ombre.
Nous ne cessons d’alimenter de nos pensées, de nos paroles, de nos humeurs ce lieu qui, bien entendu, nous influence autant que nous l’influençons. Ce bombardement constant d’informations provoquent en nous toutes sortes d’affects qu’il s’agira de gérer au mieux. Cette interpénétration des pensées est facilitée, boostée par les nouveaux médias et nous resitue dans une interdépendance planétaire et une incontournable communication, une injonction formelle de bonne parole.
Rosh Hachana est la date anniversaire de la création du patriarche de l’humanité, Adam, le premier à avoir inauguré l’ère du parlant, et pourtant ce même jour marque aussi sa faute. Le ‘’Pêché’’ depuis l’origine, בראש , BaRosh, dans la tête. Le chute du premier homme n’est pas seulement la faute d’un homme qui jadis aurait désobéi à Dieu, mais il s’agit plutôt d’une ‘’maladie’’ spécifiquement terrestre provoquée par nos limitations constitutives.
Et si l’unique faute, le seul pêché universel était celui de résister ou même parfois de nous couper du dynamisme de l’évolution. L’expression « péché originel » désigne en fait un état de nature : condition de la créature enfermée dans la finitude. Dès que le signifiant faute ou péché tinte à nos oreilles, toutes sortes de représentations se bousculent malencontreusement à la porte de notre conscience : Culpabilité, peur, superstition, colère, dépression etc.…
Les dix premiers jours de l’année qui relient Rosh Hachana à Yom Kippour, le Jour du Pardon, sont nommés ימים נוראים, Yamim Noraïm, journées redoutables, terribles, mais nous pouvons tout aussi bien entendre, jours révérés, surprenants, éclairants comme l’indique aussi la racine de ce qualificatif. Ils inaugurent le nouveau cycle du travail de raffinement de notre être.
Le nombre de ces journées (10) est en lui-même éclairant car il nous indique qu’il est question ici d’unité, de Shalem שלם, de complétude, de Shalom, שלום, de paix, de conjonction des opposés de notre être.
Le travail de clarification sur l’intention de nos pensées ainsi que les rituels pratiqués durant toute cette période viennent justement, et à point nommé, procéder à un assainissement de nos pensées, paroles, actes, et par conséquence de cette noosphère. Chaque être humain dans son unicité unique doit se rendre conscient, de l’importance de sa propre participation à ce processus.
Ce qui est nommé ‘’ pardon, expiation ou réparation ’’ se situe bien au-delà de toute religion, et participe du grand mouvement qui n’a jamais cessé depuis le commencement, celui d’élever l’être créé d’esprit mais aussi de matière, et de l’orienter dynamiquement vers le meilleur de lui-même.
En restant attentifs durant ce processus, seront mises à jour des facettes de nous-mêmes non encore intégrées, des aspects délaissés de notre ombre qui n’ont pu, jusqu’ici, être reconnus, car enfouis, évités, niés jusqu’à les avoir chassés de notre conscience. Nous avons en nous cette capacité de ‘’ne pas souffrir nos propres souffrances’’ en les refoulant, en les rendant ‘’inconscientes’’.
Dans un système qui s’organise, désordres physiques et moraux naissent spontanément et cela aussi longtemps que le dit système n’est pas organisé. Il nous est maintenant plus facile de comprendre qu’immanquablement il faudra s’attendre à souffrir des conséquences de l’action des forces de contre – évolution.
« Le mal nous apparaît ainsi comme l’ombre de l’être en devenir » Douleurs et fautes prennent alors sens et peuvent être acceptées comme un accompagnement fatal de l’effort de progrès. Dans cette perspective rassurante, tout état antérieur est par définition inachevé, et le processus vital associé à nos propres forces de régénération, facilitation du passage de l’imparfait au parfait.
Magnifique aventure de la Conscience de l’Etre en Devenir dans son Éternel Présent…
A tous le Meilleur!!!
Yehouda Guenassia
Yehouda Guenassia est psychothérapeute certifié en Gestalt Thérapie Analytique, il est affilié à l’ Association of Humanistic Psychology.
Il reçoit à Jérusalem et à Ashdod.
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