On peut légitimement se demander pourquoi le Hamas et le Djihad islamique s’obstinent à poursuivre les combats à Gaza malgré les pertes qu’ils y subissent et la défaite cuisante qui s’annonce pour leurs chefs.
C’est qu’il ne faut pas perdre de vue qu’en réalité deux guerres étroitement coordonnées se déroulent en ce moment au Proche et au Moyen-Orient mais aussi en Afrique et dans d’autres régions du monde. La première fait l’objet d’une fixation émotionnelle, médiatique et diplomatique planétaire. Il s’agit de la guerre qui oppose en effet à Gaza, l’Etat d’Israël d’une part, le Hamas et le Djihad islamique d’autre part. Pour protester contre cette guerre-là de nombreuses manifestations anti-israéliennes sont organisées un peu partout, amalgamant comme en France, des salafistes, des CGTistes, des communistes, des écologistes, et on en passe, bref tous ceux que le grand écrivain britannique George Orwell appelait dans les années 30, pour caractériser ce pudding idéologique, les « fascisfistes », faisant défiler cette fois côte à côte, sans un battement de cils, pacifistes scandalisés et fanatiques d’un islamisme exterminateur.
Pendant que le monde, comme on dit, a les yeux tournés vers Gaza, les maîtres de l’Etat pirate, nommé Etat Islamique qui a pris pied en Irak poursuit, lui, son expansion inexorable en profitant de cette diversion. De cette emprise de piraterie internationale, aucune chancellerie, ni la Maison Blanche, ni l’Union Européenne, ni nos « fascifistes » gaulois, belges, espagnols ou londoniens ne se préoccupent.
Et pourtant: après s’être emparées d’un grand lambeau de l’Irak et d’une partie de la Syrie, avec le Liban en ligne de mire, et donc le nord d’Israël, les troupes du nouveau Calife viennent de capturer la ville libyenne de Benghazi, à brève distance de Tunis. C’est sous le commandement de la même nébuleuse que les unités de Boko Haram investissent, là encore méthodiquement, des parties entières de l’Afrique où, seule, l’armée française fait le coup de poing. Certains observateurs ne croient pas devoir s’en alarmer outre-mesure, envisageant cyniquement une tripartition de l’Irak entre sunnites, chiites et kurdes. Ce ne pourrait être qu’une vue fallacieuse. Dimanche, le plus grand barrage hydraulique d’Irak est tombé dans les mains de l’armée du Calife qui vise à présent la prise de Bagdad et donc non un tiers de l’Irak mais l’Irak entier car confrontés à ses éléments armés les kurdes n’ont pas résisté longtemps. Face à une menace d’une telle envergure rien ne se passe: aucun défilé, aucune réunion des Ministres des affaires étrangères de l’Union Européenne, aucune réunion du Conseil de sécurité, la présidence Obama s’étant engluée dans les négociations sans résultats tangibles avec l’Iran. D’où ce gigantesque absentéisme diplomatique et militaire…
Dans la guerre de feu et d’images où l’Etat d’Israël se trouve en première ligne, il en va vraiment du sort de l’ensemble de cette zone géopolitique moyen-orientale, qui affectera inévitablement, au train où vont les choses, la zone euro-méditerranéenne et tout particulièrement la France. François Hollande et Manuel Valls mais non pas Laurent Fabius semblent l’avoir compris. Ce qui explique qu’ils se fassent copieusement conspuer dans ces défilés où exsude la haine d’un Etat qui, pour se battre à Gaza, ne perd pas de vue une seule seconde sa frontière nord.
Raphaël Draï