Dans 25% des couples, la femme apporte plus de 50% des ressources du foyer !
D’après une récente étude de l’Insee sur les écarts de revenus dans les 10 millions de couples français, une femme sur quatre gagne plus que son conjoint. Un cas de figure que les hommes -et les femmes- ne vivent pas toujours bien, preuve que cette situation est loin d’être acceptée socialement.
Désormais une femme sur quatre gagne plus que son mari en France. Plus qu’une révolution, une évolution. Lente. Bien acceptée chez les jeunes, cette montée en puissance économique révélée jeudi par une enquête de l’Insee sur les écarts de revenus des couples français, n’est pas du goût de tous. Des femmes, comme des hommes. « Ça me fait souffrir et mon conjoint aussi. Je n’ai aucune amie qui vit bien cette situation » confie Claire, 38 ans, dirigeante dans une grande entreprise. Idem pour Thomas, 38 ans, cadre dans le high tech : « Je vivrais mal que ma femme gagne plus. Je dois avoir un regard très vieux jeu, limite macho… J’ai toujours l’image de l’homme qui ramène le sanglier à la maison sur son dos ».
Quand ils ne sont plus le pilier du foyer, leur virilité s’en trouve parfois froissée. Le schéma familial de leurs parents a éclaté et ces hommes ne savent plus à quoi ils servent. Perdus, certains surgissent dans le cabinet de la sexologue Ghislaine Paris. « C’est la conséquence de résidus du passé, selon lesquels l’homme a le rôle viril du chef de famille et en retire une certaine puissance. Mais la donne a changé et les hommes, en perte de repères, se sentent fragilisés », raconte-t-elle. Si bien que lorsqu’un de ses clients a découvert que sa femme gagnait plus que lui à l’occasion de leur divorce, sa réaction a été très violente. « Il était à deux doigts de la frapper… Comme s’il n’avait plus d’autre façon d’exprimer sa force virile », raconte Ghislaine Paris.
Et les femmes dans tout ça ? «Elles culpabilisent, s’excusent et redoutent qu’on les regarde comme des mantes religieuses». Dans le couple, l’argent reste un vecteur de pouvoir, qui distribue des rôles stéréotypés. Certaines femmes cadres qui ont pourtant bataillé pour réussir sont perturbées par leur suprématie financière. Comme si leur réussite dévalorisait leur homme, encore plus s’ils ont le même niveau d’études. « Ce n’est jamais simple pour l’amour propre de celui qui se sent ralenti » analyse Claire. Surtout si c’est un homme.
« Socialement, c’est difficile »
Véronique, elle, s’en fout. Avec son mari, un créatif», « tout va très bien », affirme la quinqua. En revanche, leur différence de revenus est devenue un sujet miné par leurs familles et amis. « Socialement c’est difficile. On entre dans une logique de justification où il faut sans cesse revaloriser son mari… Alors maintenant on évite le sujet». A l’époque de ses parents, être une femme au travail était nouveau. «Désormais, pour la nouvelle génération, le fait qu’une femme gagne plus que le mari plus est accepté. En revanche, un homme qui ne travaille pas du tout, ça reste problématique».
Souvent, ces couples aux revenus disparates ont passé un accord : pendant que l’un assure, l’autre prend des risques. Le déséquilibre n’est que temporaire. Ainsi le mari de Violaine, 38 ans, diplômée de l’Essec et directrice de développement, a plaqué son job pour monter sa boîte. Avec quatre enfants à nourrir. «C’était le bon moment, explique Violaine. On fonctionne en vase communiquant. Et c’est temporaire j’espère. Par contre, gagner le double de mon mari et le fait qu’il se laisse vivre sur mon salaire me poserait problème».
De son côté, Jérôme, 40 ans, mène une vie douce. Ce chroniqueur culinaire gagne 30% de moins que sa femme architecte. Le couple a trouvé un équilibre et attend même un troisième enfant. Trajets à l’école, courses, cuisine, rangement… « Je suis une sorte de Tony Micelli ! commente Jérôme gaiement. « Je me suis rendu compte que je n’étais pas un ambitieux ni un carriériste. Alors je ne ressens aucune frustration». Il se considère un peu comme les femmes au foyer qui ont gagné la reconnaissance sociale. «L’intendance représente du travail. Les gens savent que nous ne sommes pas des fainéants ».
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