Anne Sinclair a officialisé sa relation avec l’académicien Pierre Nora, à l’Elysée, devant François Hollande.
Son regard azur s’illumine à nouveau. Dans la cour d’honneur de l’Elysée, chignon impeccable, tenue aussi sobre qu’élégante, Anne Sinclair ne cache pas sa joie. Son compagnon, l’historien Pierre Nora vient d’être élevé au grade de Grand officier de la Légion d’honneur par le président François Hollande. Elle l’immortalise avec son téléphone portable. Comme une midinette. Comme, à vingt ans, sur les bancs de Sciences-Po où elle ne cachait pas sa fascination pour ces professeurs qui l’éblouissaient par leur savoir. Pierre Nora, alors jeune enseignant, en était. Déjà.
Elle, l’héritière d’une famille de marchands d’art, qui aurait pu se contenter « de se donner la peine de naître », selon la formule impitoyable de Beaumarchais, n’a toujours juré que par le savoir… et le travail. Même au zénith de sa gloire télévisuelle, du temps de «7/7», elle ne laissait rien au hasard. « A force de potasser, elle connaissait mieux les dossiers que les hommes politiques qu’elle invitait », aime à se souvenir son ex-mari, le journaliste Ivan Levaï.
Aujourd’hui encore dans son discret appartement de la place des Vosges, alors qu’elle pourrait goûter au bonheur simple de l’existence auprès de celui qu’elle aime, la journaliste reste une bosseuse impénitente. Elle se rend chaque jour au Huffington Post, site dont elle est directrice éditoriale. Professionnelle, passionnée par l’évolution de son métier, elle n’économise pas ses conseils. Elle les prodigue au quotidien à sa jeune équipe. Et rédige un long édito, mis en ligne chaque lundi. On y devine souvent sa passion pour la chose politique. « Dans l’époque qui est la nôtre, écrivait-elle la semaine dernière, celui qui se lèverait pour dire ce que les citoyens aimeraient entendre et que les politiques n’osent pas toujours dire, celui qui combinerait charisme, éthique et vérité, serait peut-être un Mandela aux petits pieds, mais toutefois le grand homme qui saurait correspondre aux temps présents ».
Abel Ferrara lui reproche d’entraver la sortie du film qu’il consacre à l’affaire DSK
Elle aurait pu devenir un jour première dame. Elle jure n’en avoir jamais rêvé. Elle aurait pu ausculter au plus près les battements du cœur de la République. L’Histoire, les petites histoires aussi, qui ont entraîné la chute de DSK, la vie enfin, en ont décidé autrement. Elle s’est réfugiée dans un quotidien apaisé auprès d’un historien de renom. Pirouette du destin. Une page est bel et bien tournée, même si la journaliste ne renie rien de son passé. «Elle reste en très bons termes avec Dominique et avec les enfants de ce dernier», croit savoir un proche. Il y a quelques semaines, elle était ainsi présente auprès de Camille, la fille cadette de l’ex-directeur du FMI lors des funérailles de sa mère, Brigitte Guillemette, la deuxième épouse du socialiste.
Après les turbulences de ces dernières années, la journaliste a préféré se reconstruire. En douceur,auprès de Pierre et des siens. Elle goûte ainsi aux joies d’être grand-mère avec les petits-enfants de DSK et sa petite Jasmine, la fille de son fils David, 2 ans et demi. Lassée de voir sa vie privée jetée en pâture, elle s’était protégée par le silence. Sa dernière interview date d’il y a plus d’un an. Seule exception notable, sa récente participation à l’émission «Un jour, un destin» de Laurent Delahousse, qui sera programmée sur France 2 en 2014. Preuve, peut-être, que le goût des autres revient peu à peu. Malgré les résurgences, parfois, d’un passé douloureux. La semaine dernière, le réalisateur Abel Ferrara lui reprochait ainsi, dans un entretien accordé aux Inrocks, d’empêcher la sortie de son long-métrage. Un huis clos, librement inspiré de l’affaire Nafissatou Diallo: «Elle essaie encore de bloquer le film, peut-être qu’elle y parviendra», s’insurgeait-il. «Si ce monsieur n’arrive pas à monter son film, c’est son problème, pouvait-on entendre ces derniers jours dans l’entourage d’Anne Sinclair. Elle est bien au-delà de tout ça!» Oui. Sur des hauteurs où elle veut exister en paix.
L’académicien honoré par François Hollande
Il s’est battu pour donner aux sciences humaines toute leur place. Pierre Nora, cofondateur de la revue Débat a donc été fait Grand officier de la Légion d’honneur le 9 décembre. François Hollande a salué «le petit garçon traqué à cause de ses origines juives », avant de conclure : «de cette épreuve personnelle, vous avez conservé une révolte face à l’injustice, la barbarie, mais aussi une pudeur qui est de ne pas se raconter, mais de raconter l’histoire».