Si l’importance du sommeil dans le développement du cerveau ne fait scientifiquement plus de doute, la longueur des nuits n’est pas le seul critère à prendre en compte. La régularité des horaires de coucher pendant l’enfance joue aussi un rôle essentiel, comme vient de le montrer une étude parue dans la revue américaine Pediatrics. «Les enfants qui s’endorment à des heures irrégulières ont plus de problèmes comportementaux dans leur vie quotidienne, par exemple une tendance à l’hyperactivité ou des difficultés émotionnelles», relate Yvonne Kelly, épidémiologiste à l’University College London (UCL) et auteur de l’étude.
Pour conclure ainsi, les chercheurs ont examiné les habitudes de sommeil de plus de 10.000 enfants anglais âgés de trois, cinq et sept ans. Puis ils ont mis ces données en regard avec le comportement des bambins décrit, dans des questionnaires, par leurs mères et instituteurs. Un lien très net est apparu entre les horaires irréguliers de coucher pendant la semaine et les troubles du comportement. Ces derniers apparaissent d’autant plus aigus que la routine du soir est perturbée.
Une heure tardive d’endormissement aussi est néfaste
L’étude a été menée dans la population générale, auprès d’enfants ne souffrant pas de troubles cliniques spécifiques, ce qui la rend d’autant plus intéressante aux yeux du Dr Marie-Françoise Vecchierini, neuropsychiatre à l’Hôtel-Dieu à Paris. «C’est la première fois que l’importance de la régularité dans le coucher est démontrée de manière aussi large», souligne-t-elle. «Les parents doivent savoir qu’il s’agit d’un facteur de bon développement de leur enfant, même si ce n’est pas le seul.»
De fait, d’autres critères ont statistiquement un lien avec les troubles du comportement. Il en est ainsi, notamment, du temps passé devant la télévision et de sa présence dans la chambre, de la régularité de l’heure du petit déjeuner ou encore du temps consacré à l’aide aux devoirs et à la lecture. Même fixe, une heure tardive d’endormissement – après 21 heures – est aussi corrélée avec des difficultés chez les enfants.
Des horaires moins stables lorsque l’enfant grandit
Globalement, le fait d’avoir des horaires irréguliers est plus courant chez les enfants de trois ans (19% sont concernés) que chez leurs aînés (moins de 10%). Il est plus fréquent dans des familles de faible niveau social. Les chercheurs ont cependant découvert que leur constat était réversible: les enfants manifestant des difficultés à trois ou cinq ans allaient beaucoup mieux deux ans plus tard si leur rythme de coucher était devenu plus constant.
«On peut penser que l’irrégularité perturbe les rythmes biologiques, qui ont un rôle dans le développement du cerveau, et induit en outre une privation de sommeil», analyse le Dr Vecchierini. Autre illustration récente du rôle bénéfique joué par le sommeil, une étude de l’Académie des sciences américaines a montré que la sieste améliore les capacités de mémorisation et d’apprentissage des enfants. Pour les chercheurs, ces travaux ouvrent «des perspectives de santé publique». La question devrait ainsi, selon eux, être systématiquement abordée par les pédiatres lors des examens de routine.