Le premier volet du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) rendu public vendredi 27 septembre confirme la réalité du réchauffement climatique et le rôle de l’homme dans cette évolution.
Le secrétaire d’État américain John Kerry appelle la communauté internationale à une action forte et une coopération accrue.
Depuis le précédent rapport publié en 2007, la science a progressé, leurs certitudes aussi : après avoir pris connaissance de plus de 9 000 publications scientifiques et en avoir fait une lecture critique, 259 spécialistes du climat ont livré vendredi 27 septembre leur diagnostic, dont chaque mot a été pesé au trébuchet.
L’ÉLÉVATION DE LA TEMPÉRATURE MOYENNE CONFIRMÉE
Premier constat qui figure en tête du résumé du rapport, rédigé pour les « décideurs » : « Le réchauffement du système climatique est sans équivoque (…) L’atmosphère et les océans se sont réchauffés, les quantités de neige et de glace ont diminué, le niveau de la mer a augmenté et les concentrations de gaz à effet de serre ont augmenté ». La température moyenne à la surface de la terre et des océans a progressé de 0,85 degré Celsius entre 1880 et 2012. « Chacune des trois dernières décennies a été successivement plus chaude à la surface de la terre qu’aucune autre décennie depuis 1850 », insiste le rapport.
LA BANQUISE EN RECUL
« Au cours des deux dernières décennies, les calottes polaires arctique (Groënland) et antarctique ont fortement fondu, de même que les glaciers de montagne qui ont diminué de taille presque partout dans le monde », commente Gerhard Krinner, du laboratoire de glaciologie (CNRS-université de Grenoble). Dans l’océan arctique et l’hémisphère nord, la couverture neigeuse au printemps a continué à se rétrécir.
En Arctique, la surface de la banquise (glaces de mer), dont la fonte a atteint un record à l’été 2012, a décru à un rythme de 3,5 % à 4,1 % par décennie. D’ici au milieu du siècle, il est probable de voir l’océan Arctique quasiment libre de glace, ce qui rendrait les routes maritimes du nord-est et du nord-ouest accessibles toute l’année. Le volume des glaciers de montagne devrait aussi se réduire.
LE NIVEAU DE LA MER S’ÉLÈVE
Le niveau de la mer a continué à augmenter. De 1993 à 2010, il a crû de 3,2 mm par an. « Alors que dans le 4e rapport de 2007, le Giec prévoyait une élévation de 18 à 59 cm d’ici 2100, le cinquième rapport évoque une hausse probable de 26 à 82 cm d’ici à la fin du siècle », explique Laurent Bopp, océanographe au CNRS.
Durant la dernière décennie, la montée du niveau des mers est essentiellement due à la dilatation thermique de l’eau sous l’effet de la chaleur, puis à la fonte des glaciers de montagne, et enfin à l’amaigrissement des deux calottes polaires. Par ailleurs, il est très probable que la vitesse de montée des eaux augmente : entre 1993 et 2010, elle est de 3,2 mm par an contre 1,7 mm par an entre 1901 et 2010.
L’INFLUENCE DE L’HOMME EST « CLAIRE »
Concernant les causes de ces phénomènes, les experts se font de plus en plus plus affirmatifs. « L’influence de l’homme sur le système climatique est claire », assène le résumé. Selon le Giec, les preuves se sont raffermies depuis le précédent rapport de 2007. Ainsi, « il est extrêmement probable (c’est-à-dire entre 95 % et 100 % de chance ; NDLR) que l’influence de l’homme ait été la cause dominante du réchauffement observé depuis la moitié du XXe siècle », assure le document.
Ce facteur humain réside pour l’essentiel dans la concentration accrue degaz à effet de serre, et plus particulièrement de CO2, dans l’atmosphère. « Les concentrations de CO2 ont augmenté de 40 % depuis la période préindustrielle », souligne le rapport.
UN PALIER QUI RESTE À EXPLIQUER
Et pourtant, alors que les émissions de gaz à effet de serre n’ont connu aucun répit, la hausse de la température moyenne à la surface du globe connaît en pallier depuis une quinzaine d’années. Pour les scientifiques du Giec, ce phénomène de court terme – dû à la variabilité naturelle du climat – ne remet pas en cause la tendance de long terme au réchauffement.
« Si les émissions de gaz à effet de serre augmentent de façon continue, le climat ne réagit pas de la même façon, explique Christophe Cassou, spécialiste de la modélisation climatique au CNRS. Il y a des fluctuations autour d’une grande tendance ».
Reste à analyser le mécanisme précis qui explique cette fluctuation, qui a fait l’objet de publications trop récentes pour être incluses dans le rapport actuel. Dans les hypothèses émises figurent le rôle « d’amortisseur » des océans ou l’entrée du Pacifique dans « une phase décennale de refroidissement au début des années 2000 », précise Christophe Cassou.
DE 0,3 À 4,8 DEGRÉS EN PLUS EN 2 100
Quatre scénarios d’évolution du climat ont été élaborés pour la fin du siècle, qui prévoit une augmentation de la température moyenne de surface comprise entre 0,3 °C et 4,8 °C. Excepté le 1er scénario, qui ne pourrait se réaliser qu’avec une politique climatique très sévère, l’augmentation de la température de surface dépasserait 1,5 °C en 2100, par rapport à 1850-1900. Elle franchirait « probablement » les 2 °C avec les deux scénarios suivants, et « très probablement » avec le dernier scénario. Par ailleurs, le réchauffement continuera au-delà de 2100 selon tous les scénarios, sauf le plus bas.
EMMANUELLE RÉJU ET DENIS SERGENT la-croix.fr