La chanteuse est décédée un 24 novembre, il y a quinze ans, foudroyée par une infection respiratoire.
Une actualité dense accompagne cet anniversaire, témoignant d’une envie partagée de réécouter « la longue dame brune » de Précy-sur-Marne.
Célèbre-t-on toujours les quinze ans d’une disparition avec autant d’envie et de passion ? La ferveur, le nombre pléthorique de propositions qui accompagnent le souvenir de Barbara, décédée le 24 novembre 1997, attestent du fait que la « chanteuse de minuit » correspond plus que d’autres, sans doute, à un air du temps. Qu’il y a besoin de s’y plonger et replonger, d’aller y chercher de quoi alimenter une gaieté ou des tourments qui s’imposent à tous les âges, comme lorsqu’on se perd avec délectation dans un roman lu, relu, dont on ne peut se passer, pour s’y ressourcer. « Elle vous raconte son histoire avec tellement de force que vous êtes obligés d’entrer en vous-même, avec la même force »,commente la chanteuse Camille, interrogée dans le documentaire « Un beau jour… Barbara », que Didier Varrod et Nicolas Maupied lui consacrent, diffusé dimanche sur France 5.
On ne compte pas les objets ou moments Barbara depuis plusieurs semaines – programmes de télévision, donc, mais aussi de radio, coffret de l’intégrale de son œuvre, artistes reprenant ses chansons, livres, master class, exposition…
AU RAYON DISQUAIRE : « Une femme qui chante », coffret intégral de 19 CD comprenant plus de 350 titres de Barbara (Mercury/Universal).
Il est accompagné d’un livre rassemblant des textes de Didier Millot (biographe de Barbara), et de Marie Chaix (sa secrétaire particulière dès 1966 et gardienne de sa mémoire), des photos inédites et une discographie détaillée. Outre les différents enregistrements de la chanteuse, effectués sur les labels Decca, Pathé, Odéon, CBS et Philips, ce luxueux objet agrémenté d’un magnifique portrait de profil compte aussi son lot d’inédits – la captation le 21 janvier 1968 de son premier concert à l’Olympia –, mais aussi d’inattendus – une interprétation personnelle de « Nous ne sommes pas des anges », chanson de Serge Gainsbourg, une autre, intense, de « Même si tu revenais », tube de Claude François, et encore « Les zozos », « Ce n’est rien » ou l’épatant « L’ombre et la lumière », en duo avec Johnny Hallyday. Histoire de rappeler que la dame adorait – et se revendiquait de – la chanson populaire.
« Treize chansons de Barbara » (Naïve), par Daphné.
Convaincue par l’animateur d’Europe 1 Thierry Lecamp, la jeune et talentueuse Daphné s’est attachée à rendre hommage à l’interprète de la douleur mais aussi à « la femme d’humour qui aimait la vie ». Daphné reprend des « classiques » comme « La petite cantate », « L’Aigle Noir » ou « Ma plus belle histoire d’amour ».
Mais aussi des pépites que les connaisseurs et eux seuls, souvent, possèdent dans leur jardin secret. Ainsi « Du bout des lèvres », « Si la photo est bonne » ou « Gueule de nuit ». Sans chercher à imiter Barbara, Daphné s’en tire avec une grande sincérité. Seule une Marie-Paule Belle, avant elle, avait réussi à s’approprier cette grande œuvre en faisant plaisir aussi aux inconditionnels de Barbara. Seul regret, des duos peu indispensables avec de beaux noms de la chanson, pourtant : Benjamin Biolay (sur « Dis, quand reviendras-tu ? »), Dominique A (« La dame brune ») ou Jean-Louis Aubert (« Göttingen »).
Cette nouvelle édition revue et augmentée sous la direction de Joël July rassemble l’ensemble des textes de l’auteur-compositrice et interprète. Tous sont introduits par une note extrêmement fouillée. Également dans ce volume : des textes divers de Barbara, extraits d’interview, de discours, d’interventions parlées en cours de concerts. Et une chronologie aussi volumineuse que détaillée.
« Barbara – À demain, je chante », par Didier Varrod (Éd Textuel, 192 pages, 49 €)
Directeur de la musique à France Inter où il anime une chronique musicale chaque matin à 7 h 23, Didier Varrod est aussi un amateur absolu de Barbara, à laquelle il consacre ce très beau livre richement illustré qui dresse le portrait non d’une grande dame de la chanson mais d’une « femme qui chante », dit-il. Au fil des pages, qui la racontent chronologiquement et abondent de photographies et d’autres documents, manuscrits, affiches, articles de presse… Monique Serf (le nom d’état civil de Barbara) apparaît vivante et libre, espiègle, comme sur cette photo d’enfance où, à 7 ans, elle pose au milieu d’un groupe, déguisée en bergère, main sous le menton, regard fixe et déjà rempli d’intelligence. Au bout de sa vie, des « variations scripturales » : lettres à Barbara, ouvertes et libres, en mots ou en images (comme ces dessins à l’encre sublimes de Christian Lacroix), que Didier Varrod a demandé à plusieurs personnalités de composer.
À LA TÉLÉVISION
Sur France 5 : « Un beau jour… Barbara », de Didier Varrod et Nicolas Maupied, dimanche en horaire matinal (peu après 8 h 30), puis visible sur le site de la chaîne. « Un beau jour… Barbara » est un beau film où abondent les images d’archives donne notamment la parole à cinq talents féminins de la jeune génération chantante (Daphné, Camille, La Grande Sophie, Olivia Ruiz, L) qui évoquent « leur » Barbara, qui les habite et a pu éveiller leur envie de chanter… avec ce magnifique cri du cœur d’Olivia Ruiz : « Je la jalouse d’avoir pu faire ça »…
À LA RADIO
– Sur France Inter
Journée spéciale le 24 novembre : à 8 h 20, l’invité de la matinale est le chanteur Jean-Louis Aubert, qui fut un intime de Barbara pour qui il composa la musique des chansons « Le jour se lève encore » (dont il existe deux versions, par elle et par lui), et « Vivant poème » ; à midi, Philippe Meyer dans « La prochaine fois je vous le chanterai » s’intéresse à Barbara interprète d’autres auteurs qu’elle-même. Georges Brassens et Jacques Brel, notamment, qu’elle intégra très tôt à son répertoire ; à 19 h 20, Vincent Josse visite l’Atelier de Barbara, accompagné de Marie Chaix notamment ; à 20 heures, soirée spéciale du Pont des artistes : Isabelle Dhordain fait appel à William Sheller (qui offrit le superbe Vienne à Barbara), Christophe, La Grande Sophie, BabX et le pianiste de jazz Baptiste Trotignon qui lui rend hommage dans son dernier album Song Song Song.
– Sur Europe 1
Vendredi 23 à 22 heures, spéciale « On connaît la musique », le rendez-vous hebdomadaire de la chanson de Thierry Lecamp.
Samedi à 22 heures : concert hommage de Daphné, suivi de la rediffusion du Musicorama que Barbara avait enregistré en 1968.
Dimanche à 11 heures : Barbara sera au cœur de l’émission de Marion Ruggieri et du magazine Elle « Il n’y en a pas deux comme Elle ».
SUR SCÈNE (PARIS)
– La « master class Barbara » de Serge Hureau à La Villette (Hall de la Chanson)
Samedi 24 novembre à partir de 18 h 30, le directeur du Hall de la chanson à La Villette (ex-Tarmac), propose une « master-class » originale d’interprétations de chansons de Barbara, avec des jeunes comédiens et chanteurs du Conservatoire national supérieur d’Art dramatique de Paris.
– « Les dimanches de Barbara » au Théâtre du Palais Royal
Roland Romanelli fut pendant vingt ans son musicien, son directeur artistique, son arrangeur. Il la fait revivre dans ce spectacle qui emprunte autant à la pièce de théâtre qu’au récital, accompagné de Rebecca Mai et de Sergio Tomassi, qui accompagna aussi la chanteuse.
– « Barbara l’amour et rien d’autre » au Théâtre des Nouveautés
Chaque lundi soir, la voix d’ Enikö S, comédienne d’origine hongroise, s’empare avec talent de l’univers mélodique et poétique de Barbara, comme lorsqu’elle entame « Gauguin » avec son accent de femme de l’est et ses r qui roulent… Prochaines représentations les 10 et 17 décembre à 20 h 30.
– « Mathieu Rosaz chante Barbara » au Vingtième Théâtre
Du 23 au 27 janvier 2013, Mathieu Rosaz, artiste de 37 ans, reprend en s’accompagnant au piano une vingtaine de chansons de Barbara, dont beaucoup de chefs-d’œuvre rares. Des interprétations sincères et sensibles, tendres, justes et sobres.
JEAN-YVES DANA
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