A l’occasion de la Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de la Shoah, le Service de Protection de la Communauté Juive (SPCJ) a publié les statistiques des actes antisémites commis sur le territoire français durant l’année 2011. Christophe Bigot, ambassadeur de France en Israël a organisé lundi 20 février 2012 une conférence de presse pour commenter ces chiffres. L’ambassadeur est revenu plus en détails sur la portée de ce rapport lors d’un entretien accordé à Guysen.
389 actes antisémitismes en 2011, 466 en 2010, soit une baisse d’environ 16%. Cependant, le nombre « d’actions violentes » a légèrement augmenté. Est-ce que la mauvaise nouvelle noie la bonne ?
Il faut d’abord regarder les chiffres. 389 actes antisémitismes 2011, c’est 389 de trop, l‘objectif doit être 0.
Ensuite évidemment si on regarde sur plusieurs années on voit une baisse de 16% par rapport à l’année 2010 qui était déjà en baisse de 50% par rapport à l’année 2009. Il y a un graphique qui est publié par le SPCJ, un service crée au lendemain de l’attentat de la rue Copernic à Paris et qui est issu d’une volonté commune du CRIF, du FSJU et des consistoires. Un graphique assez illustratif qui montre l’évolution des actes antisémites en 10 ans : le chiffre de 2011 est le plus bas depuis 10 années. Non pas que je m’en réjouisse car 389 c’est toujours de trop. Mais je crois que c’est une évolution positive et qui doit beaucoup au travail effectué par la communauté juive et les autorités françaises. Il faut rappeler tout ce qui est fait par la France avec la police, avec la justice, le travail dans le domaine de l’éducation pour transmettre les valeurs, pour rappeler ce qu’à été la Shoah. Beaucoup d’actions menées, qui je crois portent leurs fruits. Tout ça pour protéger la communauté juive et défendre les valeurs de la France. Le président de la République l’a dit et dans l’opposition aussi on l’a dit: une agression contre un Juif, c’est une agression contre 65 millions de français.
Le devoir de mémoire entre dans le cadre de l’éducation et de la lutte contre l’antisémitisme ?
Bien sur. On voit bien que les jeunes générations ne connaissent pas forcément la Shoah, donc tout ce qui est fait en France ou ailleurs, les œuvres de Primo Levi, le journal d’Anne Frank, ces livres qui sont traduit en turc ou en Arabe, les visites à Auschwitz que l’on organise, cesde choses sont importantes. Quand on diffuse « Shoah », le film de Claude Lanzmann, à Istanbul ou via une TV californienne en Iran, c’est essentiel et il faut continuer et poursuivre cet effort là.
Est-ce une lutte contre l’antisémitisme ou une lutte contre la violence et la délinquance ?
Non. Je crois qu’il y a une spécificité dans l’horreur de l’antisémitisme. Il y a des instruments qui ont été dédiés à ce problème. Par exemple, ce travail. Les chiffres sont ceux du SPCJ, mais communs au ministère de l’Intérieur. Il y a un effort pour ne pas banaliser ces actes et ne pas les confondre dans une vision globale de la délinquance ou de la criminalité, car l’antisémitisme a sa spécificité, son horreur. Il suffit de connaître l’histoire de l’Europe pour voir où a mené l’antisémitisme viscéral. Quand je vois les chiffres qui baissent, je suis heureux pour la France, mais c‘est toujours des actes antisémitisme de trop. Penser qu’après la Shoah il y a encore des personnes qui profèrent des menaces antisémites, envoient des courriers, écrivent des inscriptions ou agissent de manière violente contre des Juifs en France, c’est évidemment choquant.
Israël doit-il soigner sa stratégie de communication pour prévenir l’augmentation des actes antisémites ?
Je n’établis pas de lien entre Israël et l’antisémitisme. L’antisémitisme existait avant la création de l’Etat d’Israël, il n’y a pas de corrélation entre ce qui se passe ici et les actes en Europe ou ailleurs. Il a des périodes où le processus de paix est très significatif, et il y a quand même des actes antisémites. Il y a des périodes où il n’y a pas de processus de paix et où il y a moins d’actes. L’antisémitisme, c’est une folie qui conduit à des actes très graves. Il faut arrêter de lui donner des prétextes, il faut le combattre de manière radicale.
Est-ce possible d’éradiquer l’antisémitisme ?
C’est notre objectif, ça me semble indispensable d’éradiquer ce type de pathologie. C’est la moindre des choses. Comment peut-il y avoir encore des antisémites, en 2012? Après la Shoah, comment peut-on oser être antisémite ?
Sources le CRIF via Guysen
Pour retrouver le rapport du SPCJ : www.spcj.org